18 propositions pour une bibliothèque 4e lieu aux horaires d'ouverture élargis

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    Sylvie Robert a également appelé au respect "des conditions de travail des professionnels, aussi bien dans l'organisation que dans la rémunération". (Pixabay)
  • La Dotation générale de décentralisation (DGD) permettra bientôt d'aider les collectivités à financer le fonctionnement des bibliothèques dont elles souhaiteraient élargir les horaires d'ouverture.

    Le rapport de la sénatrice d'Ille-et-Vilaine, Sylvie Robert, à qui la ministre de la Culture Fleur Pellerin avait confié en avril une mission sur l'extension des horaires d'ouverture des bibliothèques publiques, était attendu pour juillet dernier. Présenté ce lundi lors d'une conférence de presse, il comporte 18 préconisations marquant l'engagement du ministère de la Culture pour une ouverture en soirée et le week-end des établissements. Selon Fleur Pellerin, ces horaires élargis permettraient "aux bibliothèques d'atteindre tous les publics et de renforcer leur rôle de lieu idéal contre l'exclusion sociale".

    Financer l'élargissement des horaires

    La question du financement des projets d'extension des horaires est au coeur des 18 propositions présentées par Sylvie Robert, qui recommande notamment d'augmenter de modifier la loi afin que l'enveloppe de la Dotation générale de décentralisation (DGD), versée par l'Etat aux collectivités locales, puisse servir à financer les salaires du personnel liés à cet élargissement des horaires. Cette enveloppe, appelée "concours particulier", passera de 80 millions d'euros à 85 millions d'euros. La sénatrice propose également d'assouplir le ratio m²/nombre d'habitants décisif pour le versement du concours particuler afin de favoriser son accès aux communes rurales.

    Quatrième lieu

    Dans son rapport, Sylvie Robert précise que la bibliothèque "pourrait demain devenir un quatrième lieu, celui de la liberté des expressions et des cultures. Conférences, débats, rencontres publiques sur les sujets de société, expositions permettraient de donner une autre dimension à ce lieu de culture et de savoir, une dimension citoyenne que je pourrais qualifier de politique au sens large du terme. Elles feraient ainsi la démonstration que ce qui nous rassemble, en tant que communauté, est plus important que ce qui nous différencie en tant qu’individu. En un mot, elles ont pleine légitimité à être ce lieu « du commun » qui donne sens et force à notre République. Beaucoup le font déjà mais lui donner cette nouvelle identité (ou ce nouveau label) serait la reconnaissance de ses fondements et de ses évolutions. Elle mettrait enfin l’usager au cœur de son projet et l’extension et l’adaptation de ses horaires d’ouverture deviendrait enfin une évidence et donc une réalité".

    Les 18 propositions

    n° 1 : Effectuer un diagnostic temporel du territoire objectivant les rythmes de vie des usagers, examinant leur concordance avec les horaires d’ouverture des bibliothèques et fournissant des préconisations en cas de désynchronisation manifeste. En aval, une évaluation permet de vérifier la pertinence dudit diagnostic. 

    n° 2 : Modifier les textes législatifs et réglementaires relatifs au concours particulier afin d’y intégrer une part de fonctionnement non pérenne. Il pourrait être fait appel à la part fonctionnement pendant trois ans, ce recours étant renouvelable une fois après évaluation. Bien évidemment, dans cette hypothèse, les collectivités auraient la liberté de recourir à la fraction fonctionnement et/ou investissement selon leurs besoins. 

    n° 3 : Augmenter légèrement l’enveloppe de la DGD pour prendre en compte la nouvelle part du concours particulier relative au fonctionnement. D’un montant de 80 millions d’euros, il est proposé de le relever à 85 millions. 

    n° 4 : Assouplir le ratio m2 / nombre d’habitants, qui conditionne l’octroi du concours particulier pour les projets de construction ou d’extension d’une bibliothèque municipale ou intercommunale, afin de mieux tenir compte de la situation et de la dimension intercommunale en milieu rural. 

    n° 5 : Intégrer les bibliothèques, lieux de proximité et d’animation territoriale, aux opérations prioritaires définies à l’échelle nationale dans le cadre de la DETR. 

    n° 6 : Établir une cartographie documentaire territoriale comme préalable à toute signature de CTL. Par-delà les CTL, cette cartographie apparaît comme un prérequis à tout projet d’adaptation des horaires d’ouverture des bibliothèques en vue de garantir cohérence et complémentarité entre les différents établissements sur le territoire. 

    n° 7 : Encourager le développement des CTL actuellement abondés par le programme 334 (livre et industries culturelles) en les inscrivant parallèlement sur le programme 224 (transmission des savoirs et démocratisation de la culture). Cette recommandation fait parfaitement écho aux objectifs mêmes des CTL, qui soutiennent les politiques en faveur de la démocratisation culturelle, et serait de nature à être une véritable incitation financière.

    n° 8 : Accompagner les maîtres d’ouvrage en amont de tout projet de construction ou de réfection de bibliothèque pour s’assurer qu’il n’entre pas en contradiction avec les axes stratégiques et les objectifs en termes d’horaire d’ouverture. Sur le modèle d’une assistance à maîtrise d’ouvrage, les DRAC veilleraient à ce que la conception des bibliothèques facilite plus qu’elle ne contraigne leur ouverture sur des temps atypiques. 

    n° 9 : Mieux intégrer dans les cursus de formation initiale et continue les fonctions de médiation du bibliothécaire.

    n° 10 : Établir une nouvelle hiérarchie des tâches donnant désormais la priorité aux actions de médiation, avec toute la réorganisation interne que cela implique. 

    n° 11 : Faciliter l’équipement des bibliothèques en automates de prêt par le biais d’une aide bonifiée dans le cadre de la DGD (et particulièrement dans l’objectif d’un projet d’adaptation et d’extension des horaires d’ouverture). 

    n° 12 : Avoir un discours clair et validé au plus haut niveau sur l’importance des actions de médiation et d’accompagnement des publics dans l’activité quotidienne des bibliothécaires. 

    n° 13 : Poser un cadre national statutaire pour une meilleure harmonisation des négociations dans les aménagements horaires/heures supplémentaires dans les collectivités, en particulier sur la question du travail du dimanche. 

    n° 14 : Proposer un statut spécifique du vacataire étudiant en bibliothèque, sur le modèle du statut des moniteurs étudiants. 

    n° 15 : Encourager la mutualisation des moyens (bâtiments et personnels) par la mise en réseau. Un appel à projets lancé par le Ministère de la culture et de la communication pourrait permettre à certaines collectivités d’initier ce type de projets. 

    n° 16 : Expérimenter des projets de coopération entre les bibliothèques publiques et les bibliothèques universitaires à l’échelle d’un territoire. Un appel à projets lancé et cofinancé par le MCC et le MESR pourrait permettre à certaines villes candidates d’avancer sur la question de l’accueil des étudiants et des horaires d’ouverture et d’enclencher un véritable processus de collaboration. 

    n° 17 : Lancer une application mobile permettant de connaître les horaires d’ouverture des bibliothèques d’un territoire donné et éventuellement les places disponibles. (En temps réel) 

    n° 18 : Organiser sur le modèle de la Nuit des musées une Nuit des bibliothèques dont l’objectif serait de présenter les bibliothèques, leurs collections et l’ensemble de leurs services.

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    Commentaires (1)

    • Portrait de vperlab

      C’est avec plaisir (et, je l’avoue, une certaine fierté), que je découvre l’interfaçage effectué par la sénatrice Sylvie Robert entre la question de l'extension des horaires d'ouverture des bibliothèques publiques, et le modèle de la bibliothèque 4e lieu, que j’ai introduit et développé en France en 2012 (https://frama.link/SJD26E9O). La bibliothèque 4e lieu est bien connue maintenant des bibliothécaires québécois (j’ai été invitée à donner une conférence sur le 4e lieu au Congrès des Milieux Documentaires du Québec en 2014), et des étudiants en M2 Conduite de projet livre et multimédia de l’Université Clermont-Ferrand II (j’y enseigne la bibliothèque 4e lieu depuis trois ans maintenant). Cette notion a également rencontré un écho favorable auprès de certains bibliothécaires français, comme en témoigne entre autres l’ouverture fin 2014 du 4e lieu de la Médiathèque La Grande passerelle de Saint-Malo. Au-delà de la question du temps, cette notion interroge surtout la question du sens (centrer la bibliothèque sur la transmission des savoirs, et le bibliothécaire sur la circulation des savoirs, en tant qu'acteur de la médiation au sens de "mode de régulation sociale (...) régissant les rapports entre les individus, mais aussi plus généralement les relations entre l'État et la société civile" (Schmidt, 1997)). Plus que le temps, il questionne surtout l’espace du lieu de savoir. Ainsi, mon travail porte principalement aujourd’hui sur le quatrième lieu en ligne : la notion est étendue à tous les lieux de savoir, identiquement impactés par le numérique quand à la déstabilisation contemporaine de la légitimité sociale des experts de la connaissance (Devauchelle, 2012); actuellement en train de finaliser ma thèse de doctorat en sciences de l’information et de la communication sur le sujet, je m’interroge principalement actuellement sur l’émergence nouvelle des disciplines et méthodes scientifiques, compétences, et enjeux produits par les traces numériques, notamment discursives, dans les quatrième lieux en ligne. J’analyse d’ailleurs dans ce cadre un MOOC conçu par une université et une bibliothèque (https://frama.link/4UM1GxMG).

      nov 03, 2015
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