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Facturation électronique : ce qui attend l'Etat et ses fournisseurs d'ici 2020

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    « nous avons proposé la mise à disposition gratuite de la plateforme Chorus Portail Pro comme point unique de dépôt » (Pixabay/Geralt)
  • Sommaire du dossier :

    L'ordonnance du 26 juin 2014 prévoit l'obligation de dématérialisation des factures des fournisseurs de la sphère publique au 1er janvier 2017. Régine Diyani, directrice de l'Agence pour l'informatique financière de l'Etat (AIFE), en charge du programme, nous présente ses caractéristiques.

    Quel est l'objectif de l'ordonnance du 26 juin 2014 ?

    Son objectif est d'accélérer la facturation électronique afin que la relation client-fournisseur évolue vers plus de dématérialisation, non seulement entre l'Etat et ses fournisseurs, mais plus globalement à terme entre tous ceux qui s'échangent des factures. Cette ordonnance a vocation à rendre obligatoire l’envoi et la réception de factures sous forme dématérialisée pour la sphère publique et ses fournisseurs avec la mise à disposition par l'Etat d'une plateforme partagée gratuite.

    Au départ, seul l'Etat était concerné par cette mesure. Pourquoi l'avoir étendue à toute la sphère publique ?

    Il faut rappeler que l'Etat s'est engagé en 2008, à travers la loi de modernisation de l'économie (LME), à recevoir en toutes circonstances et sans jamais les refuser, toutes les factures dématérialisées envoyées par ses fournisseurs souhaitant abandonner le papier. Pour ce faire, nous avons donc mis en service la plateforme de dématérialisation de factures Chorus Factures, laquelle ne s'adressait qu'aux fournisseurs de l'Etat. Nous nous sommes interrogés sur la façon dont les autres pays européens avaient progressé en matière de dématérialisation et s'étaient emparés de cette question, et nous avons ainsi constaté que les pays du Nord, le Danemark notamment, étaient les plus avancés. Et ce, parce qu'ils avaient rendu obligatoire la facturation électronique pour tous les fournisseurs de l'Etat, ce qui n'était pas notre cas, l'Etat se devant de recevoir les factures électroniques, mais les fournisseurs n'étant pas obligés de les envoyer).

    Dans cet esprit, nous avons entamé une concertation avec les représentants des entreprises d'où il est ressorti qu'ils souhaitaient voir les collectivités locales et les établissements publics associés à notre démarche. Alors même que nous nous projetions au départ exclusivement sur les relations Etat-fournisseurs, nous avons donc associé à ce processus l'ensemble de la sphère publique, pour avoir ensuite un effet d'entraînement, à terme, sur toutes les relations clients-fournisseurs.

    Avant que l'ordonnance du 26 juin 2014 ne paraisse, nous avons ainsi étendu la sphère de concertation aux représentants des collectivités locales et aux représentants des établissements publics nationaux, en sus des représentants des entreprises.

    Quel est le calendrier du programme ?

    Le calendrier que nous avons établi au départ stipulait que toutes les grosses entreprises seraient obligées d'émettre des factures dématérialisées au 1er janvier 2016, avec un étalement jusqu’en 2021. Suite à la concertation, il a finalement été décidé de démarrer au 1er janvier 2017, soit un an plus tard, mais en terminant plus tôt, afin d'éviter que des chocs technologiques trop bouleversants interviennent entre le début et la fin du programme. Nous aboutissons finalement avec un calendrier s’étalant entre 2017 pour les grandes entreprises et les personnes publiques, 2018 pour les entreprises de taille intermédiaire, 2019 pour les petites et moyennes entreprises, et 2020 pour les micro-entreprises.

    Pour les aider dans cette démarche, vous comptez mettre à disposition des entreprises la plateforme Chorus Portail Pro. De quoi s'agit-il ?

    Dans le cadre de nos concertations avec les entreprises, la question de la réception et du format des factures s'est également posée. Nous avons donc proposé la mise à disposition gratuite de la plateforme Chorus Portail Pro comme point unique de dépôt, qui sera chargée également de redistribuer les factures électroniques vers le bon destinataire du secteur public (ce que fait actuellement Chorus Factures pour les services de l'Etat uniquement).

    Dès 2016, toutes les entreprises déjà raccordées à Chorus Facture basculeront automatiquement dans la nouvelle plateforme Chorus Portail Pro. De plus, un certain nombre de "pilotes" représentatifs des catégories de bénéficiaires (par exemple, une grosse ville, une HLM, un hôpital, etc.) sont actuellement en cours de sélection, afin de la tester au second semestre 2016.

    Quels bénéfices en retireront les entreprises ?

    La plateforme Chorus Portail Pro, que l'AIFE va réaliser, prend en compte les contraintes de gestion des entreprises. Dématérialiser leurs factures par son intermédiaire permet tout d'abord de...

    réduire de façon conséquente les coûts d'impression, d'envoi et de stockage de leurs factures ainsi que leur empreinte carbone. La plateforme permet également de suivre en temps réel l'avancement du traitement des factures, depuis leur dépôt jusqu'à leur mise en paiement. Anticiper l'échéance 2017 peut d'ailleurs être un avantage concurrentiel (clause de dématérialisation de plus en plus présente dans les marchés publics) et un élément de communication à ne pas négliger (exemplarité, image et notoriété).

    Et en termes d'économies à réaliser ?

    Nous avons estimé le nombre total de factures transmises chaque année à l'Etat, aux collectivités territoriales et aux établissements publics à plus de 95 millions. Au niveau de l'Etat, le coût de traitement d'une facture papier est estimé à 13,80 euros, tandis que celui d'une facture dématérialisée est estimé entre 7,50 euros (réception des factures par flux) et 12,72 euros (réception des factures par portail).

    D'après nos calculs, en 2021, une fois la facturation électronique généralisée, le potentiel global de gain récurrent est estimé à 710,2 millions d’euros par an, répartis en gains financiers pour 121 millions d’euros et gains de temps globaux évalués à 11 925 équivalents temps plein (ETP). Au sein de ceux-ci, les gains pour les entreprises représenteraient 335 millions d’euros (83 millions d’euros de gains financiers et 3 700 ETP). Pour les collectivités territoriales, l’estimation serait de 260 millions d’euros (31 millions d’euros de gains financiers et 6 100 ETP). Enfin, pour les autres administrations (Etat et les établissements publics nationaux ou EPN), l’évaluation représenterait 114 millions d’euros (6,8 millions de gains financiers et 2 100 ETP).

    L'échéance de 2017 implique-t-elle une mise à niveau des systèmes d'information des acteurs concernés ?

    80 000 entités publiques étant impliquées dans cette réforme, nous avons prévu différents modes de réception des factures : un mode portail classique (le plus simple, nécessitant le moins de prérogatives techniques), un mode services (avec une démarche de mise à disposition de services pour les applications de gestion financière des collectivités) et un mode flux (pour les collectivités recevant des flux de factures avec échange de données informatisées par l'intermédiaire d'un tiers de télétransmission).

    Afin que l'ensemble des acteurs concernés puisse se préparer au mieux à cette modernisation des échanges entre les fournisseurs et la sphère publique, nous avons présenté les spécifications externes de la solution à tous les acteurs concernés et susceptibles de les mettre en oeuvre lors d'un colloque que nous avons tenu à Bercy le 8 avril dernier. La deuxième version des spécifications mises à jour est également en ligne sur notre site afin qu'elles soient connues et prises en compte par chacun le plus tôt possible. Enfin, nous avons entamé en juin dernier un tour de France de la facturation électronique afin de présenter aux collectivités locales et aux entreprises les principes de cette échéance de 2017.


    + repères

    Adoption de la facture électronique dans les secteurs publics européens

    La facture électronique est encadrée par une directive européenne transposée dans le doit national de chacun des états membres.

    • 2005 : Danemark
    • 2008 : Suède
    • 2010 : Finlande
    • 2012 : Norvège
    • 2014 : Autriche, Portugal, Pays-Bas
    • 2015 : Italie, Espagne, Slovénie
    • 2015-2017 : Belgique
    • 2016 : Suisse, Estonie
    • 2017-2020 : France
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    Si la technologie est depuis longtemps disponible, le vrai démarrage de la dématérialisation de la facture reste encore à venir. C’est surtout l’État qui donne l’exemple, tout en prenant des mesures contraignantes vis-à-vis de ses fournisseurs...
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