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Du content management au content services

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    Pour Nourredinne Lamrini d'Everteam, "le cloisonnement historique entre la gestion des données et la gestion des fichiers a volé en éclats" (Pixabay)
  • Sommaire du dossier :

    Challengées par la diversification des gisements de données, les bonnes vieilles plateformes d’ECM céderaient actuellement leur place à une nouvelle génération de services de gestion de contenu, plus agiles et proches de toutes les applications métiers. Décryptage.

    L’ECM (pour « enterprise content management », en anglais) est « mort », « kaput », « fini »... Tels sont les termes utilisés par Michael Woodbridge, analyste du Gartner, dans une chronique – qualifiée de « nécrologie » – entièrement dédiée à ce concept longtemps chéri par l’institut de recherche. Les raisons qui ont entraîné la chute du concept ECM sont apparemment multiples. La principale tient à une incapacité à...

    ...relever de front, par le biais d’une seule plateforme centralisée, les quatre principaux défis auxquels sont confrontées les entreprises :

    • mieux gérer la conformité et les risques ;
    • conserver et disséminer les savoirs ;
    • réduire les coûts et optimiser les processus ;
    • contribuer aux innovations.

    Pour ce spécialiste, une écrasante majorité de sociétés ont au contraire multiplié les déploiements de plateformes de gestion documentaire au cours de ces dernières années, souvent parce qu’elles avaient échoué à déployer un seul socle ECM transversal.

    Content services

    En outre, avec la montée en puissance des services cloud de stockage et de gestion de données, et l’installation d’un nombre croissant d’applicatifs métier, notamment, les entreprises sont de plus en plus - et surtout - confrontées à la nécessité de gérer et d’interfacer une multitude d’entrepôts de données. Et donc de faire évoluer leur logique d’accès à l’information.

    Il n’est plus seulement question de savoir collecter et afficher des documents rapatriés dans une grande base de données. Il faut surtout trouver des moyens d’identifier et d’utiliser toutes les informations pertinentes, peu importe où elles sont stockées. Les plateformes et services de gestion de contenu (CSPP, pour « content services platforms and components ») sont ainsi censées utiliser en temps réel des données stockées dans tous types d’entrepôts de données (online ou offline...).

    « Les plateformes elles-mêmes, qui sont désormais plutôt matures, évoluent peu, constate Gilles Batteux, PDG de l’éditeur Kentika, spécialisé dans l’édition et l’intégration de logiciels de gestion documentaire et de gestion de contenu. Mais il y a beaucoup de mouvements du côté de la gouvernance de l’information : l’objectif est de répondre aux attentes de convergence des outils exprimées par les clients ».

    Pour les éditeurs, et les entreprises, il convient d’après ce même observateur « de faire évoluer la façon de regarder l’accès à l’information ». Et ce, en vue de « créer des passerelles inattendues entre des silos de données particulièrement éparpillées ».

    Prolongements des applis métier

    Dans la même logique, les plateformes ECM – qui ont pour certaines profondément densifié leur spectre de fonctionnalités, en incluant par exemple des outils de capture, des solutions de conformité ou bien encore des logiciels de gestion des processus métier (BPM) et des actifs numériques (DAM) - « ne doivent plus être envisagées comme des briques indépendantes des systèmes d’information et des solutions, mais comme le prolongement de certaines applications métier », indique Jean-François Millasseau, consultant sénior chez OpenText, géant canadien des solutions de gestion des informations d’entreprise (et acquéreur, fin 2016, de Documentum et de la division Enterprise Content de Dell EMC).

    « Il est possible de s’appuyer sur les contenus pour créer des services complémentaires pour les métiers – échanges de données, signature... – et optimiser les processus métier qui peuvent l’être, indique-t-il. Les services créés de la sorte seront ensuite aussi bien offerts à certains salariés dans l’entreprise qu’à l’extérieur, sur le cloud ».

    Le but est plus que jamais de décloisonner les silos qui se sont recréés dans l’entreprise ou sur le web. « Les plateformes cloud – telles Successfactors ou Salesforce - ont permis aux entreprises d’enregistrer de vrais gains en termes d’efficacité opérationnelle, souligne de son côté William Bailhache, vice-président régional Europe du sud chez Alfresco.

    Mais leur développement a contribué à repositionner les enjeux de la gestion des contenu à une autre échelle. Un exemple ? Quand vous êtes sur Salesforce, vous ne pouvez toujours pas accéder à une facture ou à un contrat stockés dans un repository SAP. C’est tout l’enjeu aujourd’hui que de trouver de nouvelles solutions à cette problématique de silo, y compris sur le cloud. »

    Micro-services

    Dans un contexte de transformation digitale, « il faut aussi contextualiser les données stockées et hébergées » par rapport à l’activité de l’utilisateur à l’instant T, et faciliter leur utilisation par les applications qui sont censé fluidifier les processus : les nouveaux « micro-services » développés sur la plateforme facilitent « la mise à disposition de vues de contenus dans un contexte applicatif ».

    Les évolutions de la plateforme de gestion de contenu visent à « permettre aux entreprises de développer et mettre en œuvre rapidement de nouveaux processus tout en s’affranchissant des contraintes traditionnelles d’infrastructure », explique William Bailhache. Et pour se mettre au goût du jour, Alfresco s’est récemment fixé trois grandes priorités stratégiques :

    • le « design-thinking » : l’expérience utilisateur du socle de la plateforme est davantage personnalisée et contextualisée, en utilisant des frameworks de développement open source, comme Angular ;
    • le « platform thinking » : le logiciel doit savoir épouser des architectures ouvertes et modulaires et intéropérer avec les différents services en ligne ;
    • l’« open thinking » : les expériences des développeurs et des utilisateurs sont analysées en vue d’améliorer de façon continue le système, et notamment les résultats du moteur de recherche.

    Case management

    Le son de cloche est quasi identique du côté de l’américain Hyland, spécialisé depuis 25 ans dans les logiciels de gestion de contenu. Güray Turan, directeur EMEA, compare l’ECM à « une commodité » : « Tous les éditeurs font peu ou prou la même chose ». Mais il estime qu’OnBase, la plateforme du groupe, se distingue de ses comparses par sa « facilité de paramétrage, sans aucune ligne de code ».

    Et il souligne que l’éditeur a fait le choix de proposer, en sus de la plateforme ECM et du workflow, une nouvelle solution de « case management » (gestion de cas) entièrement dédiée au pilotage de dossiers ou de projets complexes. « C’est une fonctionnalité qui a totalement sa place en complément des fonctions plus classiques de gestion documentaire et est en train d’être littéralement absorbée par les éditeurs spécialistes de l’ECM ».

    Concrètement, « dans le cas d’un dossier sinistre ou d’une demande de prêt, par exemple, l’utilisateur peut visualiser sur un seul écran toutes les actions provenant d’applications dispersées », puis accomplir les actions attendues. La traçabilité de chaque action est ensuite assurée, afin que l’entreprise puisse se protéger en cas de litige.

    Analyse des données

    Enfin, à l’heure des « content services », le big data et l’analyse des données restent des enjeux majeurs pour les éditeurs. « Nous travaillons depuis cinq ans sur une nouvelle offre ''content analytics'' », conclut Noureddine Lamriri, responsable consulting chez Everteam. « Il est important de développer des technologies de recherche, d’indexation, de catégorisation automatique ou de visualisation pour tous les gisements de données. »

    Entre autres difficultés, « le cloisonnement historique entre la gestion des données et la gestion des fichiers a volé en éclats », explique-t-il. « Aujourd’hui, il faut tout simplement gérer les données, y compris lorsqu’elles sont stockées dans les services en ligne de partage de fichiers, tels Box ou Google Drive... »

    Les spécialistes du cloud sont d’ailleurs déjà dans les starting blocks pour offrir des services de gestion de contenu plus poussés aux entreprises. En juin 2017, Box et Microsoft ont notamment annoncé un renforcement de leur alliance portant sur la gestion de contenu dans le cloud.

    Le but sera notamment de proposer aux utilisateurs de Box de nouvelles « technologies de traitement de contenus avancées », comme l'indexation vidéo (qui utilise le traitement automatique du langage naturel pour générer des métadonnées et des fonctions de recherche puissantes avancées). Un an plus tôt, le même spécialiste s’alliait à IBM afin d’ajouter à son offre un workflow (Box relay) simple à utiliser et « transfrontalier ».

     

     

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