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La dictée vocale au secours des forces de Police

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    Et si la dictée vocale était l’une des planches de salut tant attendue ? S’il est clair qu’elle ne résoudrait pas tous les problèmes, elle permettrait au moins de rendre plus fluides certaines procédures (crédit : Freepik).
  • [Avis d'expert] Alors qu’elle vient de quitter le mythique 36 quai des orfèvres pour s’installer dans un nouveau bâtiment ultra-moderne presque intégré dans le nouveau bloc du palais de Justice au 36 rue du Bastion dans le 17ème arrondissement de Paris (près de la Porte de Clichy), la PJ manque toujours cruellement de moyens.

    Ce bâtiment de 90m de longueur et de 37m de hauteur, paré de facettes de verre, abrite une véritable fourmilière. Entre les enquêteurs, les personnels scientifiques et administratifs, quelques 1 700 agents se côtoient chaque jour. Toutes les brigades centrales ont, en effet, été regroupées au “36 Bastion”, de la brigade de répression du banditisme à la brigade financière (excepté la BRI). L’occasion pour les agents de profiter de nouvelles salles de réunion, de nouveaux bureaux, d’une salle de vidéosurveillance, de deux salles de sport, de salles d’audition, d’un stand de tir, d’une salle de gestion de crise, de cellules de garde à vue, etc.

    Des orfèvres au bastion

    Au 36 Bastion donc, tout est neuf et permet au personnel de bénéficier d’un cadre de travail plus spacieux et plus moderne qu’au Quai des orfèvres. Mais cette effervescence autour du nouveau bâtiment ne parvient pas à masquer les incohérences du projet et le manque de moyens au quotidien. Il y a déjà la circulation qui s’avère très compliquée aux abords du 36 et qui retarde sérieusement et systématiquement l’arrivée des équipes sur les lieux des interventions. S’ajoutent à cela, la désynchronisation avec la justice étant donné que le nouveau palais de justice ne sera pas opérationnel avant avril (au mieux), certains problèmes structurels (l’entrée du parking qui ne permet pas à certains véhicules hauts de rentrer), les incohérences liées à la gestion du budget, la lenteur des outils informatiques, on en passe et des meilleurs. Les opérationnels n’en peuvent plus et lancent régulièrement des cris d’alarme qui se perdent dans les limbes de la hiérarchie.

    La voie de la modernisation

    Malgré la grogne et l’absence patente de moyens au quotidien, la Police se modernise. Et le projet Neo va dans ce sens. La PJ est, en effet, en train de s’équiper de smartphones et de tablettes (Sony Xperia), couplés à des cartes SIM et à un accès mobile proposés par Orange. L’objectif étant d’amener les applications métiers sur le terrain. Plus d’une dizaine d’applications sont d’ores et déjà disponibles. Les policiers peuvent ainsi vérifier en temps réel, sur le terrain, une identité ou la validité d’un permis de conduire, le scanner et partager l’ensemble des documents dans un cloud privé sécurisé. Ils ont également la possibilité de prendre des notes, d’établir un procès-verbal et d’accéder aux bases administratives et judiciaires (personnes recherchées, véhicules volés, permis de conduire, etc.). D’autres applications sont en cours de développement, notamment la géolocalisation des interventions et les remontées anthropométriques.

    Sécurité maximale

    En termes de sécurité, tout sera verrouillé. Tous les échanges (data ou appels) transiteront par un VPN et chaque terminal embarquera sur une carte micro SD deux certificats : l’un pour le terminal, l’autre pour l’utilisateur. Tous les terminaux tourneront sous SecDroid, un Android sécurisé validé par l’Anssi et n’auront accès qu’aux applications autorisées. Cette solution mobile est en test actuellement en région parisienne afin de vérifier qu’elle colle aux besoins du terrain.

    Des actes administratifs de plus en plus nombreux

    Malgré ces efforts de modernisation, le malaise reste palpable. Dans un livre blanc, l’association MPC (Mobilisation des Policiers en Colère) indique que dans la plupart des services, et notamment les services d’enquête, la rédaction des procédures judiciaires et des actes administratifs, de plus en plus nombreux d’ailleurs, se fait sur le logiciel LRPPN3 (Logiciel de Rédaction de Procédure de la Police Nationale), qui a remplacé en 2013 le LRP, un logiciel sous DOS de conception ancienne certes, mais jugé fiable et parfaitement maîtrisé par tous.

    Le logiciel le plus détesté de la Police

    Si LRP reposait sur une structure locale, LRPPN3 dépend d’une liaison permanente avec des serveurs extérieurs, avec tous les aléas liés à des liaisons informatiques très souvent dépassées. Conséquences : des plantages en série. Alors que les rares couacs de LRP étaient rapidement résolus par un correspondant local, les nombreux bugs de LRPPN3 ont nécessité la mise en place d’une plateforme d’assistance téléphonique, parfois elle aussi dépassée.

    “Rigide, fermé, le logiciel peine à s’adapter à une procédure pénale toujours plus lourde, déplore l’association. Il y a peu de chance qu’on connaisse un jour le coût total de ce logiciel devenu le plus détesté de la Police”.

    Heureusement, face aux récriminations, l’administration a lancé l’étude d’un nouveau logiciel, dont les grandes lignes ne sont toujours pas connues.

    Deux autres outils dans l’oeil du viseur

    Deux autres outils provoquent également l’exaspération des policiers :

    • PNIJ (la Plateforme Nationale des Interceptions Judiciaires) à destination des services d’enquête pour les investigations liées à la téléphonie. Développée par Thalès sous le contrôle du Ministère de la Justice, la plateforme connaît d’importantes défaillances qui ont parfois abouti à la perte de données d’interception, voire à des erreurs d’authentification.
       
    • NMCI (la nouvelle Main Courante Informatisée) qui permet d’enregistrer les​ évènements ayant motivé une intervention de police, les déclarations du public, l’activité et l’emploi du temps des fonctionnaires. Même si son utilité n’est pas contestée, l’outil est une véritable usine à gaz. Son usage est complexe et chronophage. La multiplicité des rubriques à remplir font qu’au final sa tenue est même devenue plus contraignante que les interventions elles-mêmes.

    Vice de procédure

    Ajoutez à cela les locaux vétustes voire insalubres, les matériels à bout de souffle ou hors d’usage, un système radio (ACROPOL) dépassé et peu fiable, un parc automobile âgé et d’état moyen, et vous comprendrez mieux le pourquoi de cette grogne. Sans parler du logiciel de rédaction de procédure souvent défaillant et qui peine à se mettre à jour, la multiplication des droits, des avis, des procès-verbaux à rédiger dans un temps limité, etc. Tout cela rend l’exercice de la profession de plus en plus compliqué, et multiplient à la fois les lenteurs et les risques de vice de procédure.

    Qu’en est-il à l’étranger ?

    Le challenge posé au département de police de Rogers dans le Minnesota (USA), déjà en sous-effectif, était de trouver de nouvelles façons de réaliser des économies, de réduire le nombre d’heures supplémentaires, liées à la transcription des rapports effectuée par le personnel administratif, d’améliorer les détails et l’exactitude de ces mêmes rapports et de les soumettre en temps et en heure au bureau du procureur du comté pour éviter les libérations des détenus pour soumission.

    Réduction des coûts et hausse de l’efficacité

    Le choix de cette administration s’est porté sur Dragon Professional de Nuance grâce auquel les officiers peuvent désormais dicter leurs rapports directement dans leur système de gestion. Lors des patrouilles, ils peuvent aussi enregistrer leurs rapports pour une transcription ultérieure. Résultat : les dépenses dues aux heures supplémentaires ont été fortement réduites, le personnel administratif peut maintenant se concentrer sur des travaux à valeur ajoutée, les officiers ont amélioré le détail et la précision de leurs rapports et enfin aucun détenu n’a été libéré suite à une soumission tardive.

    Au Canada aussi…

    Même situation au Canada, où la police de Chatham-Kent en Ontario a constaté que le process de soumission des rapports était inefficace et entraînait un retard important, des délais dans la progression des dossiers et des problèmes persistants dans la qualité du contenu des rapports. La solution ? Déployer la reconnaissance vocale de Nuance sur les terminaux Blackberry des 120 officiers, en s’appuyant sur la technologie MPA Dictation afin qu’ils puissent dicter sur le terrain. Le tout est couplé à la solution de workflow VoiceReport, utilisant la technologie Dragon, et permet éditer des rapports en patrouille. Ainsi, la police de Chatham-Kent a désormais la capacité de créer et de modifier des rapports à tout moment et en tout lieu, d’augmenter leur précision et de réduire de 80% le temps passé à les remplir.

    La voix comme interface

    Et si la dictée vocale était l’une des planches de salut tant attendue ? S’il est clair qu’elle ne résoudrait pas tous les problèmes, elle permettrait au moins de rendre plus fluides certaines procédures, d’accélérer la rédaction des procès-verbaux, de rendre les policiers plus autonomes et plus efficaces. Elle leur permettrait par exemple de créer et de modifier facilement des dossiers, de dicter des notes en mobilité. Les enquêteurs seraient alors en capacité d’enregistrer  leurs rapports à l’aide de leur smartphone puis de transcrire automatiquement la dictée en texte, une fois connecté au PC. Quelle que soit la méthode utilisée, un logiciel de dictée vocale à l’image de la solution  Dragon de Nuance s’avèrerait bien plus efficace que l’actuelle saisie au clavier. Un argument non négligeable.

    Changer de logique

    Reste maintenant à faire comprendre aux instances dirigeantes que le renouvellement des outils de travail ne doit pas uniquement relever d’une logique économique, mais qu’il doit avant tout s’appuyer sur les réels besoins des agents amenés à les utiliser.

     

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