Le traitement des factures, en particulier celles de situation de travaux, est une question délicate dans le monde de la gestion immobilière et pour les offices publics de l’habitat. Bien menée, sa dématérialisation peut apporter la rationalisation nécessaire. C’est ce que démontre le 4e focus de la rédaction d’Archimag, avec Arondor, IBM et Serda, ainsi que Paris Habitat pour son retour d’expérience.
Tenu le 1er décembre 2015, le 4e focus de la rédaction d’Archimag se consacrait à la dématérialisation des factures en gestion immobilière. Animée par Michel Remize, rédacteur en chef d’Archimag, la table ronde réunissait l’entreprise de services du numérique Arondor, l’éditeur IBM et Serda Conseil. Paris Habitat livrait son retour d’expérience.
Des contraintes juridiques et réglementaires
A partir du 1er janvier 2017, la dématérialisation des factures sera progressivement obligatoire pour l'ensemble des fournisseurs du secteur public, rappelle Pierre Fuzeau, coprésident du Groupe Serda et président de l'Afnor CN 46 Information et Documentation, Records Management et Archives. Il précise : l’obligation faite à l’Etat d’accepter les factures électroniques sera généralisée aux collectivités territoriales et à tous les établissements publics dès cette date. Voilà donc les entreprises et organismes publics placés au pied du mur.
La facture recouvre différentes facettes. Elle est un document financier et fiscal ; un document d’action, puisqu’elle valide, autorise et rémunère ; un document juridique, enfin, pouvant revêtir une valeur probante. Ses durées de conservation sont de 3 ans en droit fiscal et 10 ans en droit commercial, durées auxquelles l’usage ajoute une année.
On la rencontre sous diverses formes : papier, nativement numérique via échange de données informatisé (EDI) ou dématérialisée, renforcée, le cas échéant par une signature électronique.
Si l’EDI donne de solides garanties quant à sa valeur probante, la traçabilité est moins évidente dans le contexte de la dématérialisation sans signature électronique.
La directive européenne de 2010 (article 233) permet le recours à une piste d’audit fiable prévue par l’entreprise pour déterminer authenticité, intégrité et lisibilité de la facture. Ainsi, on peut utiliser pour ses factures n’importe quels formats et dispositifs de transport, dont le mail, et elles seront admises fiscalement dès l’instant où cette piste d’audit aura été mise en oeuvre.
Pierre Fuzeau liste en outre les gains de la dématérialisation :
- techniques : recevant les factures, la Ged facilite leur gestion et leur suivi dans les processus métier, d’autant qu’elle peut être connectée à l'ERP de l'entreprise ;
- financiers : le traitement d’une facture numérique génère des économies, ayant un coût environ deux fois moindre que celui d’une facture papier, que ce soit pour une facture émise ou reçue (5 euros au lieu de 8 à 9,5 euros et 7,5 euros au lieu de 13,8 euros, selon l’AIFE) ;
- productivité : suppression des contraintes d’impression, de mise sous pli et de saisie, et accroissement de la vitesse de circulation du document au sein de l'entreprise ;
- relation client : les délais de traitement étant réduits, les entreprises répondent plus rapidement et plus efficacement à leurs clients ; l'image de l'entreprise s'en trouve améliorée.
Projet de dématérialisation : les bonnes pratiques
Référencée auprès de l’Ugap, Arondor est intégrateur et éditeur et spécialiste de la gestion du document et de la Ged, apportant son expertise pour l’ensemble du cycle de vie de l’information, jusqu’à son archivage. A côté de la banque et de l’assurance, et du secteur public, la société a développé une compétence particulière dans l’immobilier.
Arondor propose trois produits particulièrement utiles dans un contexte de dématérialisation.
- ARender est une visionneuse robuste et facile d’utilisation ; elle supporte tous types de format (PDF, Microsoft Office, Zip and Mail, Tiff, Cad…) et se révèle très pratique pour la publication et la diffusion de rapports d'activité ;
- Fast2 est un outil de migration documentaire entre systèmes de Ged ; il s’adapte à tous les contextes de mise à jour de métadonnées, conversion de documents, application de règles métier…
- FlowerDocs est la Ged d’Arondor, disponible en Saas.
Rouzbeh Barumandzadeh et Xavier Davila sont respectivement directeur de projets et responsable du pôle capture. Ils décrivent l’accompagnement fort qui est apporté par Arondor au cours de ses différentes missions. La conduite du changement est pour eux une clé de réussite de tout projet. Elle s’appuie par exemple par une réflexion en amont sur les process, un travail des équipes concernées en atelier pour imaginer et concevoir la solution future alliant Ged et workflow.
La mise en place de l’application s’opère progressivement avec l’équipe projet, autorisant des améliorations successives. A la recette finale, font suite des recettes par profils d’utilisateurs, pour faciliter leur prise en main. C’est cette démarche qui a été suivie pour la dématérialisation des factures de Paris Habitat.
Le choix d’une solution de gouvernance
Kim-Tram Tran est responsable avant-vente chez IBM. La solution de gestion de contenu d’IBM poursuit un triple objectif d’agilité et de performance des processus, d’orientation client et de gouvernance, en s’attachant à la maîtrise des risques et à la traçabilité.
Concrètement, toute la chaîne de traitement de l’information est assurée par l’ECM d’IBM : capture, engagement (gestion des documents et des dossiers, partage et accès), activation à travers un workflow, analyse et protection (archivage légal). A noter que l’analyse s’appuie sur un moteur de recherche pour permettre la classification de l’information et le travail sur le contenu ; elle peut s’affiner davantage en recourant à l’intelligence artificielle de Watson. De plus, au-delà d’une simple conservation, il s’agit pour la solution de permettre aux collaborateurs de tirer parti des contenus. D’où le concept de “smarter content solution”.
La solution apporte une réponse à une multitude de cas d’usage : dématérialisation, gestion de contrat, lutte contre la fraude, etc. et bien sûr gestion des factures.
Retour d’expérience de Paris Habitat
Paris Habitat est un office public de l’habitat (OPH). Il rayonne sur la capitale et sa proche banlieue, avec un parc de 123 000 logements pour 286 280 habitants. Le volume des factures est en proportion - 200 000 par an -, avec une difficulté particulière pour les factures de “situation de travaux” souvent complexes et pouvant atteindre une trentaine de pages.
C’est Gildas Chauveau de Vallat, DSI de Paris Habitat, qui a pris en charge le projet de dématérialisation des factures. Forte de son expertise immobilière, Arondor l’accompagne, en bâtissant une solution recourant à FileNet Content Manager d’IBM.
L’évolution des contraintes normative pousse Paris Habitat à refondre son système de gestion des factures. Elle donne aussi l’occasion de faire un premier pas dans une stratégie digitale.
Pour démarrer le projet, Gildas Chauveau de Vallat demande à ce qu’un Poc (proof of concept) soit présenté. C’est une maquette déjà très étoffée qui est montrée en janvier 2015. Le DSI veut donner à voir à ses collaborateurs, il souhaite “mettre le métier face à l’outil”.
La démarche donne lieu à de nombreux échanges entre les équipes et les consultants et oriente les développements. Le DSI ne vise pas une solution toute unifiée, mais préfère un assemblage brique par brique. Elles comprennent de la numérisation des factures jusqu’à leur traitement dans le système. Celui-ci doit être en lien avec Ikos, la solution globale de gestion immobilière de Paris Habitat (une application de Sopra Steria) et, dans un second temps, avec le portail de l’Etat Chorus Factures.
L’ergonomie est particulièrement soignée, avec un aspect visuel agréable. Les factures sont accessibles dans des situations de mobilité : on peut être sur un chantier et consulter un contrat et ses éléments de détail ! Un accès est même ouvert pour les architectes et les fournisseurs. Les premières prises en main prouvent que la satisfaction est au rendez-vous.
La mise en ligne générale (“go live”) est prévue d’ici la fin 2015 ; en 2016, l’outil sera opérationnel en totalité.