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Bibliothèques : quand les SIGB passent à la mutualisation

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    Les bibliothèques municipales et assimilées (bibliothèques d’EPCI) ont acquis 1 048 produits en 2017 contre 1 023 en 2016. Plus d’un tiers de ces produits sont des logiciels open source. (DR)
  • Confrontées à de sérieuses restrictions budgétaires, les bibliothèques optent progressivement pour des SIGB mutualisés. Mais elles le font également pour moderniser leurs infrastructures et accroître leur efficacité documentaire. 

    Cela fait plusieurs années que les bibliothécaires réfléchissent à l’avenir de leurs systèmes d’information. Aussi bien dans les bibliothèques universitaires que dans les établissements ouverts au grand public. 

    Du côté universitaire, cette réflexion est notamment portée par l’Abes (Agence bibliographique de l’enseignement supérieur) qui plaide depuis 2011 pour une révision de la situation actuelle. Son constat : la multiplicité des SIGB (systèmes intégrés de gestion de bibliothèques) actuellement déployés dans les établissements engendre des coûts importants tant en terme d’acquisition de logiciels que de maintenance. Et à l’heure où les bibliothèques sont affectées par de sérieuses compressions budgétaires, tout ce qui est de nature à alléger la facture est le bienvenu. Mais cette volonté de changement n’est pas motivée par des seules préoccupations budgétaires. Des raisons liées à la modernisation des bibliothèques et à l’efficacité documentaire ont également été prises en considération. La mutualisation des SIGB est alors apparue comme une piste de réflexion. L’Abes l’a d’ailleurs déjà adoptée dans son vocabulaire puisque l’agence a lancé en 2012 son projet baptisé SGBM : système de gestion de bibliothèque mutualisé.

    En portant ce projet SGBM, l’Abes vise trois objectifs : 

    • fournir un système de gestion locale mutualisé aux bibliothèques des établissements membres du réseau Sudoc ;
    • fournir, le cas échéant, un outil de découverte local associé au système de gestion ;
    • garantir l’articulation entre le SGBM et les systèmes nationaux de signalement administrés par l’Abes pour les bibliothèques.

    Acquisitions, migration, workflow

    Neuf établissements universitaires et huit commissions se sont attelés au chantier. Les membres ont planché simultanément sur les acquisitions, la migration, le workflow, le coût... Sans oublier l’aspect juridique du projet. « Afin de faire émerger des offres qui conviennent à tous au regard des besoins exprimés, c’est la formule complexe du dialogue compétitif qui a été choisie », souligne-t-on à l’Abes. Ce dialogue compétitif durera une année et permettra aux fournisseurs d’être auditionnés par chacune des commissions. 

    Ce sont ces mêmes commissions qui vont concevoir 70 cas pratiques destinés à préfigurer les usages des SGBM « dans une situation réelle ». Les prestataires retenus pourront alors répondre point par point aux questions des commissions et aux besoins exprimés par le réseau de bibliothèques universitaires.

    En cette fin d’année 2015, plusieurs étapes ont déjà été franchies. L’Abes a entamé 

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    une série d’auditions de candidats et va procéder à une phase de tests. Celle-ci s’achèvera le 20 juin 2016. Date à partir de laquelle sera prise la décision d’attribution de l’accord-cadre. Quant à la phase de réinformatisation des sites pilotes, elle interviendra au cours du premier semestre 2017 et sera suivie d’une deuxième vague. Déploiement à l’horizon 2018.

    Passage à l’acte 

    Du côté des bibliothèques de lecture publique, les SIGB mutualisés sont d’ores et déjà une réalité. « La réflexion a été engagée il y a plusieurs années et elle a rapidement été suivie d’un passage à l’acte aux alentours de 2012 », explique Richard Aïoutz, chef de projet numérique pour la médiathèque départementale du Puy-de-Dôme. « Les SIGB mutualisés existent déjà, dans des formats variables, au niveau des bibliothèques départementales de prêt (BDP). Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les BDP sont précurseurs, car leur mission consiste à soutenir les bibliothèques de lecture publique qui fonctionnent avec des SIGB différents ».

    Une dizaine de bibliothèques départementales de prêt (Alpes-Maritimes, Ardennes, Cantal, Landes, Hautes-Pyrénées...) auraient déjà opté pour un SIGB mutualisé selon un recensement (non exhaustif) réalisé par Richard Aïoutz : « Le passage progressif aux SIGB hébergés en mode Saas peut également être à l’origine de mutualisations ». Ainsi, deux bibliothèques de Haute-Loire et une autre située dans le département voisin de l’Ardèche partagent un logiciel et certaines règles de catalogage. Voilà un exemple qui ravira les promoteurs de la mutualisation ; la césure départementale n’est pas un handicap insurmontable ! Quant au réseau « Pays Lecture », il dispose également d’un SIGB mutualisé (sous PMB) et développé au profit de plusieurs structures.

    Des notices maintenues dans des silos isolés

    Lorsqu’elles souhaitent mutualiser leurs SIGB, les bibliothèques de lecture publique ne le font pas seulement pour des raisons financières. Même si l’argument budgétaire joue souvent un rôle de déclencheur, ces bibliothèques sont en quête d’autres gains. À l’instar de ce qui se passe dans le milieu universitaire, elles cherchent aussi à accroître leur efficacité documentaire. De nombreux bibliothécaires estiment en effet qu’il est absurde que chaque établissement maintienne ses notices dans des silos isolés. Et avec l’avènement du web 2.0, ces justifications professionnelles sortent renforcées. 

    La mutualisation est également l’occasion pour les bibliothécaires de s’interroger sur leurs pratiques : que partage-t-on ? Quels catalogues ? Quels services au public ? Quelle coopération documentaire ? « On peut même s’interroger sur l’intégrité de l’information bibliographique produite par la BNF lorsque celle-ci peut être enrichie par d’autres bibliothèques », ajoute Richard Aïoutz. Autant de questions qui seront probablement résolues au fur et à mesure de l’avancement du chantier de mutualisation. 

    Mais si ce mouvement vers la mutualisation se généralise à l’échelle du pays, on peut s’interroger quant à l’impact qu’il aura sur les éditeurs de logiciels de bibliothèque. « Cet impact devrait surtout concerner la partie achats de logiciel », estime Richard Aïoutz. « Mais les éditeurs facturent également des prestations de maintenance et de la bande passante. Ils pourront donc compenser la baisse de revenus dus aux logiciels par l’augmentation de leurs prestations ». 

    Dans son étude annuelle sur le marché des bibliothèques, Marc Maisonneuve (Tosca Consultants) estimait quant à lui que « l’année 2014 n’avait pas été une bonne année pour les ventes de progiciels et de services en ligne aux bibliothèques. Les trois principaux secteurs de clientèle - bibliothèques municipales, bibliothèques spécialisées et bibliothèques d’université - ont connu une forte baisse des ventes en volumes ».


    + repères

    Waterbear, le premier SIGB libre et gratuit

    Son nom n’est pas encore aussi connu que celui de Linus Torvalds, créateur du célèbre système d’exploitation Linux. Mais Quentin Chevillon commence à se faire une réputation auprès des bibliothécaires les plus technophiles. Après avoir créé Moccam, un logiciel permettant de mettre en réseau des bibliothèques dont les SIGB sont différents, il est également à l’origine de Waterbear .

    « Waterbear est le premier logiciel professionnel de gestion de bibliothèque (SIGB) totalement libre, gratuit et accessible en ligne », explique Quentin Chevillon sur son site. « Cela veut dire qu’il suffit d’un ordinateur relié à internet pour vous inscrire et disposer en quelques minutes d’un logiciel de bibliothèque proposant toutes les fonctionnalités dont vous avez besoin : catalogage, prêt, retours, réservations, transit, import/export Unimarc, échanges avec la BDP, revues (périodiques), acquisitions, statistiques... » Waterbear permet de récupérer des notices auprès de la BNF et les informations incomplètes sont automatiquement récupérées auprès de la Bibliothèque nationale de France sans intervention du bibliothécaire.

    Un système d’autocomplétion et d’inscription des usagers via Google Maps est également mis à disposition des bibliothécaires. Quant au catalogue, il devient accessible pour les lecteurs via internet grâce au logiciel libre AFI-Opac. L’accès à Waterbear se fait par simple inscription en ligne.

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