RETROUVEZ CET ARTICLE ET PLUS ENCORE DANS NOTRE GUIDE PRATIQUE : STRATÉGIE DATA : TIREZ PROFIT DE L’INTELLIGENCE DES DONNÉES
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Si des écoles formant les futurs entrepreneurs, comme l’École des hautes études commerciales de Paris (HEC) ou TBS Education, à Toulouse, proposent dans leurs cursus une formation au management de la donnée, ce n’est pas par effet de mode. C’est bien parce qu’enseigner des stratégies de développement prenant en compte la data a du sens, avec à la clé des bénéfices certains. Pour les organisations, le premier enjeu de la data gouvernance est de s’y mettre. Mais d’autres défis seront ensuite à relever.
Répondre à des attentes
En exploitant les données, l’attente est triple : stimuler la productivité, développer l’activité et créer de la valeur pour les clients ou usagers. "La transformation des données est une politique d’innovation organisationnelle", affirme Julien Lévy, professeur associé et directeur scientifique du Centre Innover et Entreprendre de HEC. "Et l’outil de cette politique est la donnée et son traitement" (www.hec.edu). Il reprend à son compte l’expression "tout transformer en données pour tout transformer par les données".
Les collectivités territoriales ne sont pas en reste, avec leurs motivations propres. Selon la troisième édition du Baromètre national sur la data dans les territoires, réalisé par l’Observatoire Data Publica et ses partenaires, les trois priorités des collectivités dans l’utilisation des données sont l’amélioration de la qualité du service (73 %), l’amélioration de l’information et de la transparence vis-à-vis des citoyens (59 %) et l’amélioration de l’évaluation et du pilotage des politiques publiques (56 %).
À défaut d’un engagement data, les organisations s’exposent à une productivité, à des performances et à une agilité moindres. Pour Paul-Arthur Oddon, directeur des opérations chez Solstice Lab, cabinet de conseil et entreprise de services du numérique (ESN) spécialisée dans la donnée, il est impératif de prendre le train de la data : aujourd’hui, les acteurs investissent, s’équipent, se transforment par la data. Ceux qui ne suivent pas risquent de perdre pied dans des marchés en constante évolution.
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Par ailleurs, la gouvernance des données s’immisce dans la gouvernance de l’information. Selon le 14e Rapport Serda-Archimag sur la gouvernance de l’information numérique en 2025, le cœur d’un programme de gouvernance de l’information se centre aujourd’hui sur la donnée : 83 % des professionnels interrogés le pensent. Et pour 75 %, la perte des données et des documents est la conséquence première du risque en matière de sécurité des informations numériques. Désormais, 44 % des organisations incluent l’ensemble des données dans leur gouvernance.
Dompter ses données
Conséquence du numérique, les organisations ont, comme jamais, à disposition une masse d’informations pouvant les renseigner sur leur activité, leur environnement, leur marché, leurs clients ou usagers. Quelques chiffres permettent de mesurer ce big data : le volume de données numériques créées ou répliquées dans le monde est passé de 2 zettaoctets en 2010 à 18 zettaoctets en 2016, et devrait passer, selon les prévisions, de 64 zettaoctets en 2020 à 181 zettaoctets en 2025 (fr.statista.com). Quant aux organisations publiques, elles ont pour avantage de disposer de données très vastes, couvrant jusqu’à la totalité de la population. Un véritable appel à se lancer dans la data gouvernance.
Mais à l’échelle de l’organisation, si les données deviennent omniprésentes dans toutes les activités, on se rend compte de l’inconvénient de les garder en silos. Chaque métier, avec ses applications, crée ou reçoit des données pour son usage spécifique (la logistique, le contrôle de gestion, les ressources humaines…) ; or, c’est une analyse et un usage croisé de ces données qui peut être source de valeur. C’est l’activité de l’organisation dans son ensemble qui a intérêt à être soutenue par les données, dès lors qu’elles sont appréhendées de manière différente, notamment transverse.
Trouver les bons leviers
Pour avancer, une approche agile est recommandée. De fait, Solstice Lab, qui s’adresse aux PME et ETI, voit venir ses clients avec un "simple" enjeu data, au départ limité à un cas d’usage. C’est, par exemple, une direction financière qui réclame de meilleurs indicateurs de pilotage. Lui répondre amène un début de rationalisation autour de la data. Il faudra cependant l’impulsion, le soutien, voire l’implication de la direction pour que l’ensemble de la stratégie soit interrogé sous l’angle data, ce qui devra interpeller chaque activité. C’est aussi au niveau de la direction que se décident les budgets… D’un sujet de questionnement, la data devient ainsi un axe prioritaire.
Bien s’équiper
Impossible d’avancer dans la data gouvernance à périmètre du système d’information égal. Il faut adapter la technologie dans ce sens. Le retour de l’investissement data n’ira pas forcément de soi, pouvant être plus qualitatif que quantitatif. L’agilité invite à passer par des "proofs of concept" (Poc), occasions d’une première démonstration de valeur, puis à déployer.
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Il faut penser stockage de données (data lake, data hub), captation des données à même de gérer la diversité des sources (API), accès de tout un chacun, traitement et visualisation, ceci dans un environnement nécessairement cloud et tout en gardant à vue le cycle de vie de la donnée - de quelle source elle provient et quelles transformations elle a subies (data lineage). Dans les organisations data driven, une telle configuration technologique s’impose ipso facto. Pour les autres, elle s’installe progressivement.
L’outillage s’étoffe encore. On cherche à s’assurer de disposer de données suffisamment étendues et de qualité, ce qui est une problématique à part entière. Une concrétisation doit être trouvée au niveau des métiers. À eux de prendre en compte la dimension data dans leurs projets et de chercher à innover. Des applications de différents niveaux sont à leur disposition, notamment de type business intelligence ou master data management (MDM) et data catalog.
Dans ces solutions, l’intelligence artificielle (IA) et le machine learning (ML) sont présents. Ils aident à automatiser des tâches complexes, à identifier des modèles cachés, des particularités, des différences ou des corrélations, à détecter des tendances et opportunités futures, ce qui vient nourrir la prise de décision. Quant à l’IA générative, plus gourmande en data, elle reste encore sous le regard circonspect de la data gouvernance, qui craint un afflux de données non maîtrisées. Attention, prévient Paul-Arthur Oddon, qui se méfie d’une confusion entre IA et data, "il faut encadrer l’IA, lui donner une finalité précise - et elle coûte cher".
Une finalité d’un autre ordre est la détection proactive de risques. Analysant de vastes ensembles de données en temps réel, les algorithmes d’IA parviennent à identifier des anomalies, des schémas inhabituels ou des comportements suspects. De quoi motiver des mesures préventives pour atténuer les risques de non-conformité, de sécurité des données et de pertes financières avant qu’ils ne deviennent des problèmes majeurs.
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Fédérer les pratiques
La stratégie data doit être portée par un chief data officer (CDO). Sa responsabilité est de fédérer les pratiques, d’éviter les conflits et de superviser les différents experts de la donnée. Bien sûr, protection des données personnelles oblige, il devra ou pourra aussi y avoir un data protection officer (DPO).
Les experts de la donnée sont en mesure de dire ce qu’il est possible de faire ou non avec un ensemble de données ou quels types de données sont manquants au regard des objectifs. Mais ce sont l’activité et les métiers qui définissent ces objectifs et qui apportent les projets de données. Lorsqu’un mode de fonctionnement aura été trouvé entre les experts de la donnée, la DSI et les métiers, la data gouvernance pourra atteindre sa vitesse de croisière.