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Bibliothèques universitaires : adieu Cadist, bonjour CollEx

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    Parmi les collections de la bibliothèque Sainte-Geneviève (Paris 3), la Bibliothèque nordique a été labellisée CollEx en 2017. (crédit : Wikipedia/Marie-Lan Nguyen)
  • Après une trentaine d’années d’existence, le réseau Cadist a été supprimé pour donner naissance aux CollEx (Collections d’excellence). Ce nouveau dispositif entend mettre les services aux chercheurs au cœur des projets de collection. Pour les bibliothèques délégataires, cela signifie de nouvelles missions qui restent à définir.  

    En 2014, l’Agence bibliographique de l’enseignement supérieur​ (Abes) publiait un article appelant à « La nécessaire rénovation du réseau des Cadist ». Quatre ans plus tard, cette rénovation a pris la forme d’un renouvellement terminologique : les Cadist, Centres d’acquisition et de diffusion de l’information scientifique et technique, ont disparu au profit des CollEx, Collections d’excellence. 

    Pour mener à bien ce projet, une entité a été créée : « L’infrastructure de recherche CollEx-Persée se situe à un double niveau de coopération et de développement de nouveaux services. Il prend la relève du réseau des Cadist, sur la base de fonctions fortement rénovées ». La philosophie générale du nouveau dispositif pourrait être résumée ainsi : rénover le réseau Cadist en mettant les services aux chercheurs au cœur des projets de collections.

    Tout au long de l’année 2018, des groupes de travail se réuniront pour appliquer cette feuille de route.

    Le flou et l’expectative

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    Du côté des bibliothèques universitaires associées au programme CollEx, quel sera l’impact sur leurs nouvelles missions ? Et quelles seront les conséquences sur leur organisation quotidienne ? « À ce jour, nous sommes encore dans le flou », estime Christine Okret-Manville, directrice adjointe de la bibliothèque de l’université Paris-Dauphine ; « je constate que les établissements membres du réseau Cadist remplissaient globalement les missions qui leur étaient assignées, même si des aménagements devaient être apportés. Dans l’attente de précisions sur nos futures missions en tant que bibliothèque associée, nous sommes dans l’expectative ».

    Autre sujet d’interrogation : quel impact sur le budget d’acquisition ? Dans un contexte général de forte compression budgétaire qui touche les bibliothèques universitaires depuis plusieurs années, la disparition des Cadist signifie une réduction des capacités d’acquisition. 

    À Paris-Dauphine, la dotation de référence de 2013 s’élevait à environ 250 000 euros. Cette dotation diminue progressivement et devrait disparaître à l’horizon des deux années à venir. « Des désabonnements ont dû être effectués, et la direction de l’université Paris-Dauphine a heureusement décidé de compenser en partie cette baisse afin de maintenir notre offre documentaire à niveau », explique Christine Okret-Manville ; « mais qu’en sera-t-il pour les établissements qui ne pourront pas compenser la disparition progressive des dotations ? »

    Cartographier, numériser, moderniser

    Difficile dans ces conditions de connaître avec précision les conséquences des nouvelles collections d’excellence sur l’organisation des BU délégataires. Pour autant, on connaît les grandes lignes auxquelles vont s’atteler les groupes de travail chargés de réfléchir à l’application concrète des CollEx. L’un d’entre eux devra cartographier les grands gisements documentaires patrimoniaux et scientifiques sur tous supports. « Cette cartographie “vivante” sera consultable sur un portail dédié. L’objectif est de rendre visibles ces collections, reliées à la cartographie des lieux de recherche, afin d’apporter un meilleur appui aux chercheurs », explique-t-on du côté de CollEx-Persée.

    Un autre groupe de travail réfléchira à la mise en place d’une politique nationale de numérisation. Objectif : numériser une production scientifique composée de thèses, d’archives de chercheurs et de littérature grise. À ce jour, on ignore si ces chantiers de numérisation seront réalisés en interne - ce qui suppose des ressources matérielles et humaines - ou bien confiés à des prestataires en numérisation. Dans tous les cas, CollEx-Persée escompte de nouveaux usages rendus possibles par la numérisation comme l’analyse rapide d’un corpus grâce à l’indexation automatique de textes.

    Les collections numérisées auront un autre avantage : elles permettront d’améliorer la fourniture de documents à distance. Pour les promoteurs du projet, « il s’agit de repenser et moderniser le dispositif de fourniture à distance de documents, et le prêt entre bibliothèques, autour de grandes bibliothèques de recours ».

    Cœur de métier

    Ces chantiers - parmi d’autres - sont désormais consignés dans un document de travail. Reste à les faire vivre. Les premières réunions de travail ont déjà eu lieu, mais les bibliothécaires s’interrogent sur les ressources humaines qu’ils devront mobiliser pour remplir leur nouvelle mission. Leur sens de l’initiative sera également mis à contribution : « La fourniture de l’information reste au cœur du métier », explique Christine Okret-Manville. « L’an dernier, une enquête auprès des chercheurs qui fréquentent la bibliothèque de Paris-Dauphine montrait que leur principale demande portait sur l’accès à davantage de documentation (ouvrages, revues, accès à des bases de données). Outre ce que nous faisons déjà dans nos établissements au profit des chercheurs, nous allons développer de nouveaux services dans le cadre CollEx car la notion de services est au cœur des collections d’excellence ».


    + repères

    Des Cadist aux CollEx, près de 40 années de coopération documentaire

    C’est en 1980 que sont apparus les premiers Centres d’acquisition et de diffusion de l’information scientifique et technique (Cadist) au sein d’établissements supports. Leurs missions ont été ensuite précisées par deux circulaires en 1983 puis en 1992 :

    • acquérir des ressources documentaires françaises et étrangères dans un champ disciplinaire précis ;
    • former un réseau d’accès à l’information lorsque les circuits ordinaires sont insuffisants.

    Pour mener à bien leur mission, les établissements supports reçoivent chaque année une subvention spécifique. 

    Collections d’excellence 

    Mais plus de trois décennies après sa création, le réseau a montré des marques d’essoufflement : « Son organisation ne permet plus de répondre entièrement aux besoins nouveaux qui ont émergé, avec le développement des offres numériques et la restructuration du paysage de l’enseignement supérieur et de la recherche », estime l’infrastructure CollEx Persée qui a pour objectif de prendre le relais du réseau Cadist.

    En 2017, les Cadist sont donc devenus CollEx (collections d’excellence). Ses missions ont été élargies auprès de nouveaux établissements comme la Bibliothèque nationale de France et certains organismes de recherche.

    À ce jour, une trentaine de CollEx sont recensées dans différents champs disciplinaires : histoire, sciences humaines et sociales, sciences exactes, langues et civilisations étrangères.

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