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Loi Reen : où en sont les collectivités territoriales ?

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    23,5 % des collectivités n’ont pas engagé d’actions de sobriété numérique. (DR)
  • Plus d’un an après le vote de la loi Reen visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique en France, les collectivités territoriales se sont-elles déjà lancées dans une stratégie ? Nous avons leur avons posé la question. État des lieux.

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    La stratégie de sobriété numérique des collectivités est-elle un secret bien gardé ou simplement peu enclenchée ? Difficile d’avoir un retour massif des acteurs concernés par l’article 35 de la loi Réduction de l’empreinte environnementale du numérique (loi Reen) du 15 novembre 2021.

    À savoir, les communes et leur intercommunalité de plus de 50 000 habitants. D’après le baromètre 2022 d’OpenCitiz, cabinet de conseil en stratégie spécialisé en politiques publiques territoriales, le niveau de connaissance de la loi Reen en 2021 était majoritairement faible (54,7 %). Celui-ci était même nul pour 23,8 % des sondés.

    Pourtant, selon cette loi et son décret d’application datant de juillet 2022, ces communes devraient déjà avoir mis en place un programme, avec pour objet « un état des lieux recensant les acteurs concernés et rappelant, le cas échéant, les mesures menées pour réduire l’empreinte environnementale du numérique ».

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    Celui-ci doit aussi comprendre un bilan de l’impact environnemental du numérique et des usages au sein du territoire et s’il y en a, une description des actions déjà engagées dans ce sens. Ce travail préalable doit servir de base à la définition et l’application d’une stratégie dès le 1er janvier 2025.

    Le numérique, angle mort des politiques environnementales

    Seules 113 personnes concernées par la loi Reen ont participé à notre enquête (1) sur sa mise en application. Si le sujet ne déchaîne pas les foules, il représente pourtant un levier d’action pour lutter contre le réchauffement climatique.

    En France, le numérique constitue en effet une source importante d’émissions de gaz à effet de serre : 15 MtCO2eq, soit 2 % du total des émissions en 2019. En l’état, ce chiffre pourrait croître de 60 % d’ici 2040. Véritable angle mort des politiques environnementales, il existe pourtant des marges de manœuvre pour réduire son impact.

    Dans son rapport « Pour une transition numérique écologique », le Sénat a déterminé en juin 2020 plusieurs axes de travail autour de la lutte contre l’obsolescence programmée, pour l’écoconception des sites et des services numériques ou encore la sobriété des centres de données…

    Plusieurs de ces recommandations nourrissent la loi Reen, notamment les objectifs définis par le décret d’application dédié aux collectivités territoriales.

    Un manque de compétences

    Malgré le faible taux de réponse, quelques tendances peuvent se dégager de notre enquête. À ce jour, 23,5 % des répondants n’ont pas engagé d’actions de sobriété numérique et 55 % en mènent quelques-unes de manière ponctuelle. 19,6 % ont déjà établi une stratégie.

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    À noter cependant que 35,5 % d’entre eux affirment ne pas savoir quels sont les grands objectifs de la stratégie qui sont ou qui vont être mis en place sur leur territoire. Pour les autres, plusieurs axes sont explorés. La majorité des sondés compte bien sensibiliser les élus et les agents publics au numérique responsable et à la sécurité informatique.

    En effet, selon le baromètre OpenCitiz, 57,1 % des communes estiment que le besoin de monter en compétences est l’un des principaux freins à l’application d’une stratégie numérique responsable. 37,5 % misent aussi sur la gestion du matériel informatique. Quel est le cycle de vie du matériel ? Quelle est la gouvernance adoptée ? Autant de questions qui caractérisent cet objectif qui va de pair avec la problématique de la commande publique.

    30 % des répondants souhaitent remettre en question leurs pratiques. Notamment à travers le réemploi, une attention au taux de réparabilité des équipements acquis et à la lutte contre l’obsolescence. L’écoconception des sites internet et des services numériques fait aussi partie des axes de travail (25 %), tout comme une meilleure politique des données (22,5 %).

    Que ce soit en matière d’ouverture ou de valorisation. Enfin, 22,5 % des répondants veulent s’engager à mieux sensibiliser les citoyens aux problématiques environnementales du numérique et à favoriser l’inclusion numérique.

    Des communes déjà engagées dans une stratégie de sobriété

    Plusieurs communes ont déjà partagé leur expérience dans la mise en place d’une telle stratégie. C’est le cas de Rennes Métropole qui a adopté son « plan stratégique pour un numérique responsable » en mars 2022. « 6 axes le définissent : l’écologie et l’environnement, la dimension sociale, l’approche éthique, le développement économique, la gouvernance et l’équilibre territorial, l’efficience des services publics », explique la collectivité bretonne.

    De son côté, la Ville et la Communauté d’Agglomération de La Rochelle ont signé la « Charte numérique responsable » (portée par l’Institut du Numérique Responsable) en 2019. Pour préparer sa feuille de route, la Communauté de l’Agglomération de La Rochelle a réalisé un bilan afin d’évaluer son empreinte carbone liée au numérique. Cette dernière s’élève ainsi à 680 tCO2eq/an.

    C’est la fabrication du matériel qui pèse le plus (53,8 % des GES), tandis que les abonnements, prestations et consommables représentent 36 %. L’électricité des postes ainsi que les data centers capitalisent 4,1 % des émissions de gaz à effet de serre.

    L’Agglomération a aussi mesuré son degré de maturité « numérique responsable » qui s’élève à 2,11/5, contre 1,88 à l’échelle de l’ensemble des collectivités sondées. Deux grands axes découlent de ce premier calibrage : la poursuite des actions d’information et de formation et la politique d’achat du matériel informatique et bureautique.

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    Pour ce dernier point, l’agglomération compte davantage se tourner vers des équipements sobres et réparables et encourager le réemploi.

    Un haut comité pour un numérique écoresponsable

    Pour monter une telle stratégie, seuls 9,8 % des personnes interrogées lors de notre enquête confirment se faire accompagner par un organisme externe et 9,8 % y pensent sérieusement (51,2 % ont répondu « non » et 28,3 % « ne sait pas »).

    En novembre 2022, Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la Transition numérique et des télécommunications, Dominique Faure, secrétaire d’État chargée de la Ruralité et Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, ont lancé le « haut comité pour un numérique écoresponsable ».

    Un des objectifs de ce nouveau comité est de mieux faire converger les différentes lois telles que la loi Agec (2020), la loi Climat et Résilience (2021) et la loi Reen. En plus de réaliser une feuille de route de la décarbonation de la filière numérique d’ici avril 2023, la nouvelle instance devrait formuler des propositions à destination des communes pour la mise en œuvre de la loi Reen.

    Pour l’heure, mises à part les déclarations formulées lors du lancement, il n’y a pas d’autres précisions quant au calendrier de ce comité ni dans quelle mesure il accompagnera concrètement les collectivités.

    (1) Enquête en ligne menée du 28 novembre 2022 au 2 janvier 2023.

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