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Courrier : les entreprises doivent faire cohabiter courrier papier et flux numériques

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    "Il n’y a pas eu de dématérialisation, mais seulement un changement de matière", affirme Anthony Mahé, sociologue et directeur de la connaissance du cabinet de conseil Eranos. (DR)
  • Anthony Mahé est sociologue et directeur de la connaissance au sein du cabinet de conseil Eranos. Auteur de "La dématérialisation n’a pas eu lieu" (Éditions L’Agence Les influences), il évoque une nouvelle matérialité de la communication, considérant que les courriers papier et les emails ne sont pas substituables.

    Sommaire de ce dossier dédié à la gestion électronique du courrier :

     

    anthony-mahe-courrier-papier-numeriqueEn tant que sociologue, quel regard portez-vous sur la dématérialisation documentaire ?

    Comme l’indique le titre de mon livre, le terme dématérialisation est très mal choisi ! Ce mot désigne le passage du papier à quelque chose de digital.

    Or, en réalité, il n’y a pas eu de dématérialisation, mais seulement un changement de matière. Nous avions du papier et nous avons désormais un écran : c’est toujours de la matière. Le digital passera toujours par un objet : ordinateur, serveur, câbles sous-marins…

    >Lire aussi : La gestion électronique du courrier : une étape incontournable de tout projet dématérialisation

    L’imaginaire de la dématérialisation est intéressant à étudier : nous pensons que tout le monde a intérêt à aller vers la dématérialisation et que c’est le sens de l’Histoire que de passer du papier aux flux numériques. Je pense que cela est faux et que le terme dématérialisation nous induit en erreur.

    À mes yeux, le numérique apporte de nouvelles manières de communiquer. L’erreur est de penser qu’on serait en train de remplacer le papier par du numérique et que les choses vont continuer comme avant.

    Nous devons comprendre qu’un nouveau média s’est ajouté à une palette de médias anciens : courrier, journal, radio, télévision, livres, etc. L’enjeu est de penser la place du numérique parmi les autres formes de média.

    Comme l’a écrit Marshall McLuhan, le message est le média lui-même. On n’accède pas à l’information de la même manière selon le média. Le numérique propose une manière spécifique d’accéder à l’information qui ne peut pas remplacer les autres manières dont on accède à l’information.

    >Lire aussi : La gestion électronique du courrier (Gec) de A à Z

    Un courrier qui est dématérialisé a-t-il encore une matérialité ?

    Oui, car pour accéder au contenu de ce courrier dématérialisé, il faut toujours un corps qui va agir sur une matière : une main, une souris, un écran… Il est intéressant de constater que l’imaginaire du numérique a généré une idée de biens non palpables. Or on sait que les outils du numérique ont un bilan carbone et un impact sur la nature.

    Quel est, à vos yeux, l’impact psychologique de la disparition progressive du courrier physique au profit de flux numériques ?

    Je pense qu’il n’y a pas de disparition et qu’il n’y en aura pas. Je crois que l’on va trouver un point d’équilibre et une cohabitation entre courrier physique et courrier numérique comme cela s’est passé pour d’autres supports : photographie, cinéma, musique…

    Les chiffres publiés par La Poste montrent un déclin du courrier physique, mais il y a bien un impact psychologique notamment dans le courrier d’entreprise : l’attention. On ne capte pas l’attention de la même façon avec du digital et avec du courrier physique.

    Les anthropologues ont montré que lorsque l’on reçoit un courrier physique, on déclenche un rituel domestique qui consiste à aller à la boîte aux lettres, à rapporter le courrier, à l’ouvrir, à le lire… Il s’agit d’un cadrage rituel de l’accès à l’information contenue dans ce courrier. Les gens se concentrent sur ce rituel et ne font pas autre chose en même temps. La disposition mentale et cognitive dédiée à cette activité est entière.

    >Lire aussi : Pourquoi et comment mettre en place une gestion électronique du courrier (Gec) ?

    Au contraire, nous n’avons pas les mêmes dispositions mentales face aux flux numériques. Les innombrables notifications que nous recevons modifient notre attention aux informations.

    Les entreprises ont-elles intérêt à migrer vers le courrier dématérialisé ?

    Le flux de courriels reçus par les cadres est démentiel. Selon certaines études, le temps passé à la gestion du courrier électronique peut atteindre jusqu’à un tiers du temps des salariés. Aujourd’hui, leur attention est saturée.

    Les entreprises peuvent utiliser le courrier électronique pour de la notification flash : les notifications sont très efficaces pour déclencher ce que le marketing appelle « call to action ». En revanche, si elles veulent créer des bulles d’attention, le courrier papier est plus recommandé.

    Les entreprises doivent faire cohabiter le courrier physique et les flux numériques en se plaçant du côté du destinataire. 

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    Dans les organisations privées et publiques, la gestion de courrier est une problématique universelle. Ce sont des flux papier et numériques à capter, traiter et mettre à disposition. On peut s’en charger soi-même ou recourir à l’externalisation, selon les enjeux, la volumétrie, les ressources internes, l’environnement…
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    Rencontre avec Stéphane Roder, le fondateur du cabinet AI Builders, spécialisé dans le conseil en intelligence artificielle. Également professeur à l’Essec, il est aussi l’auteur de l’ouvrage "Guide pratique de l’intelligence artificielle dans l’entreprise" (Éditions Eyrolles). Pour lui, "l’intelligence artificielle apparaît comme une révolution pour l’industrie au même titre que l’a été l’électricité après la vapeur".
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