Archimag. Quelles sont les ambitions de la chaire d’ingénierie documentaire récemment crée au Cnam ?
Ghislaine Chartron. Il faut d’abord préciser que la création d’une chaire dédiée à l’ingénierie documentaire au sein du Cnam (Conservatoire national des arts et métiers) symbolise une reconnaissance de notre secteur et de l’INTDintd.cnam.fr/Institut national de sciences et techniques de la documentation créé en 1950, l’une des plus anciennes écoles de documentalistes en France. ">i (Institut national des techniques de la documentationi) dans cette institution – la chaire intègre la direction de l’INTD. Elle ouvre un réel champi de développement de la formation et de la recherche au sein de cet établissement. Nos ambitions concernent trois axes principaux en synergie avec les missions du Cnam : développer des formations en adéquation avec les demandes du monde socio-économique ; des activités d’études et de recherche liées à l’innovation dans le secteur de l’infodoc; organiser des moments de rencontre et de débat réguliers sur les évolutions de nos métiers.
Partagez-vous la critique selon laquelle l’enseignement des techniques de documentation est vieillot ?
Ce n’est peut-être qu’une question de vocabulaire. Nous aurions pu renommer notre institut en utilisant des termes plus vendeurs. Mais l’habit ne fait pas le moine. Le défi essentiel qui nous préoccupe est aujourd’hui de répondre à la diversité des fonctions confiées aux documentalistes. Il faut à la fois maintenir une formation généraliste liée au coeur du métier et envisager de développer des spécialisations en adéquation avec les repositionnements nécessaires.
Les entreprises sont-elles à la recherche de professionnels de l’infodoc ou bien préfèrent-elles confier ce travail à des non-professionnels ?
C’est très variable. Les métiers de l’informationi-documentation sont exercés à la fois par des spécialistes et par des personnes à double compétence. Nous devons concevoir notre enseignement non seulement en terme de diplômes mais aussi en terme de compétences secondaires– par exemple, former des ingénieurs aux fonctionsde la veille Intelligence économique.
">i. Le secteur public recrute encore des spécialistes avec une formation initiale infodoc. Pour le secteur privé, la situation est beaucoup plus contrastée.
L’avenir de ces métiers est-il de s’orienter vers des méthodes proactives ?
Il est évident que le documentaliste doit agir en médiateur à la rencontre de ses interlocuteurs ; il innove, impulse et propose de nouveaux produits et services. Proactif dans ce sens-là, oui ! En revanche, les documentalistes ne sont pas souvent impliqués dans les processus de prise de décision. Voilà la limite du concept proactif. Les embauches concernent encore majoritairement des fonctions au coeur du métier de la documentation, dans l’organisation de l’information, la recherche d’information, le traitement documentaire et les services aux usagers. Certains occupent des postes plus stratégiques, convoités par d’autres branches professionnelles, comme la gestion, le marketing et l’intelligence économique.
L’INTD (Institut national des techniques de la documentation) est un institutdu Cnam (Conservatoire national des arts et métiers) dédié à la formation de spécialistes de l’information et de la documentation. Fondé en 1950 et situé dans le troisième arrondissement de Paris, l’INTD propose des formations diplômantes et des modules de formation continue. Son site vient d’être refondu.
La génération se formant actuellement à l’INTD est-elle plus sensible que les précédentes à la recherche d’information via internet">i ?
Oui, le rapport à internet s’est généralisé. Mais cela ne concerne pas que les jeunes générations. Nos étudiants, quel que soit leur âge, ont intégré la recherche d’information sur tous les supports. L’enseignement réserve une large place aux ressources numériques. Je pense, par ailleurs, que ce goût pour la recherche d’information renvoie à une dimension ludique, de l’ordre des jeux de stratégie.
Quels sont les futurs défis de l’INTD ?
La réalité professionnelle évolue très vite. Mon ambition est de mettre en place des formations légères, capables de suivre les progrès de nos métiers dans le records management, la veille, la gestion des flux numériques…Nous devons surveiller ces changements et répondre à la demande des entreprises : c’est l’esprit même du Cnam. Nous souhaitons aussi créer un diplôme dédié au document numérique. Il croisera l’informatique et les techniques documentaires. Car, aujourd’hui, de nombreuses propositions d’embauche intègrent une forte composante numérique. Donc, beaucoupd’ambitions pour une petite équipe !
Quels conseils de lecture donneriez-vous aux documentalistes et aux étudiants en documentation ?
Je leur conseillerais de suivre de nombreuses sources francophones (Archimag, le Bulletin des Bibliothèques de France, la revue Documentaliste, les dépêches du GFII…). Mais lorsque je cherche de la nouveauté, je me tourne très souvent vers les sources anglophones, riches en innovations de services, technologies émergentes, repositionnements du métier. Je lis régulièrement Digital Library Magazine, Learned Publishing, Serials, Journal of Documentation mais aussi des blogs, des forums et des sites spécialisés. Nous avons tout intérêt à travailler avec d’autres pays. Nos métiers continueront d’exister si nous apportons une vraie valeur ajoutée dans le cycle de l’information. Et pour ceci, il faut des individus imaginatifs et actifs.