Bibliothécaire et documentaliste, Jean-Philippe Accart est également enseignant, formateur et consultant. En collaboration avec Marie-Pierre Réthy, il publie “Le métier de documentaliste” (Éditions du Cercle de la Librairie), une quatrième édition qui vient sept ans après la précédente. Un événement pour les professionnels.
Quels sont les apports de la quatrième édition du "métier de documentaliste" ?
Les apports de cette quatrième édition sont nombreux et montrent bien les évolutions en cours : le principe de gouvernance de l’information émerge, celui de culture de l’information est affirmé tandis que le droit de l’information est redessiné. Les outils documentaires de traitement et d’analyse documentaires sont renforcés par l’apport des ontologies, folksonomies et taxonomies, les cartographies servent à mieux représenter l’information. Le web social se déploie, l’utilisateur intervient grâce au tagging et crowdsourcing, les systèmes de recommandation se développent. La recherche d’information demande une véritable expertise face au trop plein de données (big data, open data, curation).
"Le discours a radicalement changé et place la documentation dans une ère de gestion et de technologie", écrivez-vous ; que voulez-vous dire ?
Déjà appuyée en 2008, la technologie est maintenant dominante et oblige la plupart des métiers à renforcer des compétences en la matière. Cela peut entraîner une spécialisation des métiers : digital curator, community manager… De même dans les organisations, les techniques de gestion prennent parfois le pas sur le travail documentaire.
Après des années de crise et d'inquiétude professionnelle, y a-t-il matière pour les documentalistes à voir l'avenir avec optimisme ?
L’avenir de la documentation est ouvert en pensant à ces mots-clés : curation, collaboration, médiation, évaluation, formation. Mots-clés qui résument les défis que le documentaliste doit relever et qui sont développés en conclusion.
Selon le baromètre emploi d'Archimag-Serda Formation, 16% des annonces d'offres d'emploi à destination des documentalistes concernent des missions d'intérim : quelle interprétation donnez-vous de cette tendance ?
L’emploi en intérim a toujours existé en documentation, il s’est accentué avec la crise économique qui n’est pas terminée. Il montre aussi que le recours ponctuel aux documentalistes est nécessaire aux entreprises même si certains services de documentation ont disparu. L’intérim est de toutes manières nécessaire à l’économie.
Nombre de personnes pensent que le terme de "documentaliste" est aujourd'hui obsolète ; vous semblez privilégier le terme d'"architecte de l'information" qui est "le mot de la fin" de votre ouvrage, que recouvre-t-il ? pourquoi cette préférence ?
Tous les dix ou vingt ans, le même débat ressurgit autour du terme « documentaliste », cela est dû à une insécurité permanente, un manque de reconnaissance et à une assise encore mouvante : à mon sens, je ne vois pas en quoi il est obsolète, c’est un terme générique à partir duquel se déclinent d’autres plus spécifiques. La cartographie des métiers de l’ADBS montre bien les métiers de l’information et les liens qui existent entre eux.
L’architecte de l’information est une des voies possibles et des plus prometteuses pour le documentaliste, il allie la conception technique des dispositifs, l’organisation des contenus (sous forme d’ontologies, de classement thématique, sémantique, de système de navigation par facettes) et le design interactif, le plus souvent sous forme de cartographies. Il serait le chaînon manquant entre le système d’information documentaire et le système d’information plus global.