Patrick Clastres ou la contre-histoire des Jeux olympiques par les archives

Le 03/09/2025 Bruno Texier

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Les travaux de Patrick Clastres portent sur l’histoire et la géopolitique du sport international (©FotoFremiot).

Historien du sport et professeur à l’Université de Lausanne, en Suisse, Patrick Clastres a publié un essai consacré aux Jeux olympiques. Il revient sur son parcours et sur son attachement aux archives.

CET ARTICLE A INITIALEMENT ÉTÉ PUBLIÉ DANS ARCHIMAG N°386

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Sur le site officiel de l’Université de Lausanne, son profil ressemble à une compilation de titres académiques : Docteur en histoire contemporaine, membre de l’Institut des sciences du sport, chercheur au Centre d’histoire internationale et d’études politiques de la mondialisation, chercheur associé au Centre d’histoire sociale des mondes contemporains (Paris 1 Panthéon-Sorbonne), coordinateur des activités du Centre d’études olympiques & de la globalisation du sport de l’Université de Lausanne.

Cette liste aurait pu également signaler une agrégation d’histoire, un Capes, un master, un DEA, une thèse… "Avec un père enseignant en histoire-géographie, je suis tombé très jeune dans la discipline historique et je me suis passionné dès la classe de 6e pour la civilisation gallo-romaine et son archéologie", se souvient Patrick Clastres.

Mais c’est finalement vers le sport que se tourneront ses travaux au mitan des années 1990. Sous la direction de l’historien Jean-François Sirinelli, il s’attelle à la rédaction d’une thèse consacrée à Pierre de Coubertin. Il sera à l’origine du dépôt de ses archives à Sciences Po et y animera des séminaires qui accueilleront des centaines de chercheurs français et étrangers pendant treize ans.

Une contre-histoire de l’olympisme

Inventeur de Jeux olympiques modernes en 1892, Pierre de Coubertin est sans aucun doute l’un des Français les plus connus dans le monde. "C’est aussi un intellectuel et un homme d’influence au parcours politique complexe", explique Patrick Clastres, qui vient de consacrer un essai aux Jeux olympiques ("Les Jeux olympiques de 1892 à 2024 : une aventure mondiale", Presses universitaires de Rennes, 2025).

Plus de 460 pages pour "discerner ce qui est proprement neutre dans le sport et ce qui est engagé, mais masqué". Une contre-histoire, en quelque sorte, qui a fortement déplu aux instances olympiques : "mon travail est perçu comme une attaque visant Coubertin par le Comité international olympique", constate-t-il. "Ce n’est pas le cas, car mon intérêt pour le sport, pour l’histoire et pour les archives s’est conjugué dans la figure de Pierre de Coubertin". Ce qui n’a pas empêché le Comité d’Organisation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 de casser le contrat d’édition pour cet ouvrage.

Il est vrai que cet essai traite de sujets que le CIO ne souhaite pas aborder : l’imbrication des enjeux politiques et sportifs, les nominations éminemment politiques des membres du CIO, le dopage, la corruption… Résultat : les 500 exemplaires du premier tirage se sont écoulés en quelques semaines, un score très honorable pour un essai publié par un éditeur universitaire. Deux nouveaux tirages sont en cours, ainsi qu’une édition en anglais.

Les archivistes, un milieu extrêmement professionnel et rigoureux

Par un drôle de hasard, la Faculté des sciences sociales et politiques de l’Université de Lausanne, où Patrick Clastres enseigne depuis 2015, n’est qu’à quelques encablures du splendide Musée olympique, qui abrite les archives historiques du CIO. Le milieu archivistique n’a plus guère de secrets pour lui : "je suis en contact régulier avec les archivistes depuis plusieurs décennies. C’est un milieu extrêmement professionnel et rigoureux qui est malheureusement accablé par des charges administratives. J’ai moi-même organisé un colloque consacré aux archives du sport en 2022 et j’ai constaté que les archivistes sont en attente d’entreprises communes avec les historiens".

Entre toutes ses activités, Patrick Clastres trouve le temps de fouler les courts de tennis. "Un sport qui dévoile ce que nous sommes profondément…"

Il like

Son événement sportif préféré ? "Sans surprise, le tournoi de Roland Garros !"
Sa destination préférée ? "Syracuse, en Sicile, et son île d’Ortygie, où le temple d’Athéna est devenu cathédrale."
Sa chanson préférée ? "Llegó Cachaíto", du pianiste de jazz cubain Roberto Fonseca, à pleurer de tant de douceur."