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Livres numériques en bibliothèque : PNB est-il trop éloigné des réalités du terrain ?

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    Les statistiques d’emprunt dans les bibliothèques confirment la curiosité des usagers pour le support numérique. En 2019, 7 424 prêts avaient été enregistrés ; en 2020, ce chiffre atteignait 10 427. (Freepik/@creativeart)
  • Le déploiement du dispositif de prêt numérique en bibliothèque (PNB) se poursuit à un rythme régulier dans les bibliothèques françaises. Mais le modèle économique est dénoncé par Réseau Carel qui pointe les conditions imposées par les éditeurs de ressources numériques (ebooks, presse en ligne, musique, etc).

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    Près de sept ans après son lancement, PNB se porte plutôt bien. Le dispositif prêt numérique en bibliothèque est aujourd’hui installé dans 260 réseaux de bibliothèques et semble en passe de convaincre les bibliothécaires malgré des réticences que l’on continue d’observer ici et là.

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    70 000 titres numériques sur PNB

    Le catalogue de PNB propose désormais plus de 70 000 titres contre 17 500 en 2015. Le nombre de prêts, quant à lui, a connu une très forte hausse passant de 67 493 en 2015 à 851 000 en 2020.

    À l’occasion d’une journée d’étude de Réseau Carel qui s’est tenue au mois d’octobre dernier à la bibliothèque publique d’information du Centre Pompidou, plusieurs retours d’expérience ont été présentés aux participants. Notamment celui de la bibliothèque départementale de la Vienne qui a déployé PNB au mois de septembre 2017.

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    Aujourd’hui, une soixantaine d’établissements partenaires sont en mesure d’intégrer cette bibliothèque numérique baptisée « Lire en Vienne », soit un bassin de 160 000 habitants. Fin 2020, le service comptait 28 000 inscrits.

    Les statistiques d’emprunt confirment la curiosité des usagers pour le support numérique. En 2019, 7 424 prêts avaient été enregistrés ; en 2020, ce chiffre atteignait 10 427. Dans le même temps, le nombre de lecteurs au format numérique passait de 669 à 1 002.

    « Nous avons enregistré un bond des prêts lors du premier confinement », explique Stéphane Joseph, responsable du pôle informatique de la bibliothèque départementale de la Vienne. Rappelons que, lors du premier confinement, les Français se sont tournés vers le livre numérique faute de pouvoir se rendre dans les librairies. Selon le baromètre des usages du livre numérique réalisé par la Sofia, le SNE et la SGDL, 27 % des Français ont découvert le livre numérique pendant le confinement et la moitié des 15-34 ans sont aujourd’hui des lecteurs de livres numériques.

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    Un quasi-doublement du budget d’acquisition dans la Vienne

    L’offre éditoriale de la bibliothèque départementale de la Vienne est composée de romans pour adultes (85 %), de romans destinés à la jeunesse (10 %) et de documents divers (5 %).

    Lors du lancement de PNB, le budget d’acquisition avait été fixé à 10 000 euros. En trois ans seulement, il avait été revu largement à la hausse avec un quasi-doublement pour atteindre 19 000 euros. Reste à savoir si cette hausse budgétaire est motivée par la demande des lecteurs ou, à l’inverse, si le public plébiscite un catalogue plus fourni.

    Lors de la création de « Lire en Vienne », les bibliothécaires ont fait le choix de la simplicité et proposé des ateliers afin d’accompagner les usagers dans la prise en main de l’outil. À ces ateliers, est venue s’ajouter une aide à distance. Cette assistance a également été proposée aux bibliothèques partenaires.

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    Éditorialisation des contenus

    Autre retour d’expérience, celui du portail Limédia Mosaïque porté par les bibliothèques du Sillon Lorrain. Cette offre numérique s’adresse aux habitants de Nancy, Épinal, Metz et Thionville. Elle propose à ses usagers des livres, des titres de presse, mais aussi de la musique.

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    « Nous avons travaillé sur l’éditorialisation des contenus et les modes d’accès aux ressources », explique Fabien Vandamme, responsable des collections des bibliothèques de Nancy ; « la page d’accueil est changée tous les jours afin de présenter la variété de nos collections ».

    Limédia Mosaïque porte bien son nom. Les ressources apparaissent sous forme de vignettes formant une mosaïque multicolore. Il suffit de cliquer sur le titre désiré pour accéder à la version numérique. En bas de page, des suggestions sont proposées en lien avec le titre choisi.

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    La qualité et la quantité ont un coût

    Au total, 9 500 livres électroniques sont mis à la disposition des usagers. Seule l’offre de livres numériques est opérée par PNB. Le corpus presse est opéré par Academia Scopalto tandis que le volet musique est opéré par DiMusic.

    La qualité et la quantité ont un coût : un budget de 140 000 euros est consacré chaque année pour l’acquisition de l’ensemble des ressources numériques. À lui seul, le pôle livre numérique absorbe 50 000 euros par an. Précision importante : l’acquisition est réalisée auprès d’un libraire local.

    Pour Fabien Vandamme, le projet présente plusieurs dimensions :

    « Limédia mosaïque a une double particularité. La première est que le site a été entièrement conçu et réalisé par des bibliothécaires avec la société Atol CD pour la partie technique et les trois graphistes de l’espace My Monkey pour le design du site. Il s’agissait d’avoir la main sur le produit, entièrement en open source, tant dans la phase de conception que pour ses évolutions à venir, là où les agrégateurs de ressources livrent des solutions clé en main certes prêtes à l’emploi, mais bien moins modulables. La deuxième, c’est qu’il a fallu mener cette opération entre bibliothèques situées dans une zone géographique de 160 km de longueur, et qu’il a fallu pour cette raison imaginer un mode de collaboration inédit » (3 questions à Limédia Mosaïque : 1. Naissance du projet et premiers bilans sur Epitomé - Hypotheses).

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    Adapter PNB à la réalité du terrain

    Si le dispositif PNB se déploie en France, il n’en continue pas moins à soulever des critiques.

    « Les mécanismes de paiement sont compliqués », constate Guillaume de la Taille, président de Réseau Carel ; « les bibliothèques achètent des licences donnant droit à prêter des livres. Ce droit se présente sous la forme de jetons dont le nombre est fixé par l’éditeur. Pour les petites bibliothèques, le nombre de jetons imposé par les éditeurs est trop élevé par rapport au bassin de lecteurs. Cela pose le problème de la constitution de collections ». De fait, ce système risque de privilégier les livres à forte rotation au détriment des titres moins « consommés ».

    Réseau Carel dénonce également des coûts cachés qui font s’envoler le prix de PNB.

    « Nous voulons l’adapter à la réalité du terrain. Nous souhaitons une tarification qui tienne compte de la dimension des bibliothèques. Heureusement, certains éditeurs se sont rapprochés des demandes de Réseau Carel », se réjouit Guillaume de la Taille.

    Du côté de Dilicom — opérateur technique de PNB —, on rappelle que les prix sont fixés par les éditeurs.

    « Nous souhaitons améliorer l’expérience utilisateur et l’interopérabilité », explique Véronique Backert, directrice générale de Dilicom. D’ores et déjà, des tutoriels sous forme de vidéos ont été mis en ligne sur YouTube pour accompagner les bibliothécaires.

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    Des freins à la lecture numérique en bibliothèque

    9 182 euros. C’est le budget moyen consacré par les bibliothèques à PNB (chiffres 2018). Un chiffre qui cache de fortes disparités selon les collectivités. Certaines d’entre elles peuvent consentir un budget atteignant 60 000 euros.

    Mais, selon une étude menée par Frédérique Laugrost (Panorama des ressources numériques dans les bibliothèques adhérentes de Réseau Carel en 2019. Frédérique Laugrost) auprès de 109 bibliothèques, les freins au développement de la lecture numérique dans les bibliothèques sont encore trop nombreux : tarification nébuleuse, inadaptation du modèle économique pour les bibliothèques, conditions de prêt restrictives, évolutions techniques non supportées par les SIGB, bilan en demi-teinte du côté des usagers…

    Aux yeux de certains bibliothécaires, la priorité semble plutôt se porter sur les ressources en autoformation, la vidéo à la demande, les offres de presse et de musique.

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