Près de dix ans après la loi pour une République numérique qui prévoit la diffusion en ligne des décisions judiciaires, un rapport replace la confidentialité des données personnelles au centre des débats. Dans un rapport remis au ministre de la Justice Gérald Darmanin, un groupe de travail préconise l'occultation systématique d'un certain nombre de données avant leur mise à disposition du public. L'occultation correspond au masquage ou au retrait des données identifiées comme confidentielles et non communicables.
Parmi les données concernées figurent les noms et prénoms des magistrats, membres du greffe et avocats ainsi que la dénomination sociale des entreprises. Cette recommandation s'appuie sur les dangers encourus par les professionnels du droit : "Plusieurs magistrats, entendus dans le cadre des travaux du rapport sénatorial sur l’IA
générative (…) ont exprimé leur inquiétude face à la circulation virale de leurs décisions sur les réseaux sociaux, sans occultation ni explication." Dans la ligne de mire du rapport, les réseaux sociaux "permettent la viralité de cas individuels, la sortie de contexte de décisions complexes, la mise en cause ciblée de magistrats."
Numéros SIREN et SIRET
Du côté des entreprises, le rapport se montre favorable à une extension du principe d'occultation : "L’open data des décisions rendues en matière commerciale et économique est perçu comme un élément de vulnérabilité par la majorité des acteurs du secteur économique. Si aucune dérive n’a pu être caractérisée, il n’en demeure pas moins que le risque est réel." Seraient concernés par l'occultation systématique le nom des entreprises et les numéros d’identification, les numéros SIREN et SIRET attribués par l’INSEE, le numéro de TVA intercommunautaire au sein de l’Union Européenne ainsi que que le nom et l’adresse de l’entreprise et/ou de son dirigeant.
Pour Daniel Ludet, conseiller honoraire à la Cour de cassation et président du groupe de travail sur l’évolution de l’open data des décisions de justice, ce rapport ne doit pas être perçu comme un retour en arrière par rapport à l'esprit des données ouvertes. Ce rapport proposer en effet "un dispositif de flux différenciés de décisions de justice (…) mises à disposition de publics spéciaux afin d'assurer une meilleure satisfaction des besoins de leur activité professionnelle ou économique".