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Comment l’Ina apporte son expertise à la Maison des Archives du Congo

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    Plus de 2 000 boîtes film ont été analysées durant la mission de l'Ina à la Maison des Archives Congo. L’analyse des supports film et vidéo a mis en évidence d’importantes dégradations. (Aude May)
  • Missionnée par le ministère de la Culture et des Arts, la Maison des Archives du Congo (MAC) mène depuis 2018 un vaste programme de préservation des archives congolaises. L’association, qui a déjà achevé un chantier de sauvegarde des archives papier avec le soutien de la coopération française, sollicite l’appui de l’Institut national de l’audiovisuel (Ina) pour engager ce même travail sur le fonds d'archives audiovisuelles. Récit de la mission d’expertise qui s’est tenue en juin 2021 à Brazzaville avec pour objectif de dresser un état des lieux et imaginer les différents scénarios afin de rendre accessible ce précieux patrimoine national.

    Temps de lecture : 6 minutes

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    Les archives audiovisuelles de la Maison des Archives Congo

    La Maison des Archives Congo (MAC) est une association congolaise loi 1901 dirigée par Tall Boukambou. Elle a pour objet la collecte, la restauration, la numérisation et la valorisation du patrimoine mémoriel du Congo et du bassin du Congo. En 2019, elle engage le chantier de sauvegarde du fonds d’archives audiovisuelles stockées depuis 2007 dans les anciens locaux de Télé Congo, situés dans le quartier de Bacongo, au sud de Brazzaville.

    Ces collections sont composées d’archives de programmes de Télé Congo diffusés à partir de 1962. Témoignages de l’histoire politique, sociale et culturelle du pays, elles renferment une partie de la mémoire audiovisuelle du Congo. La MAC travaille sans relâche pour en offrir l’accès aux professionnels et aux publics.

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    Urgence : sauver les archives

    Pour le président de la MAC, Hassim Tall Boukambou, « vu les conditions de conservation du fonds audiovisuel de l’ancien site de Télé Congo et la dégradation accélérée de certains supports, il est urgent de sauver le maximum d’archives au plus vite.

    L’engagement des pouvoirs publics, l’environnement institutionnel et financier et la mobilisation des partenaires comme l’Ina et l’Ambassade de France sont des soutiens précieux qui permettent d’envisager un projet de sauvegarde sur ces fonds en danger et, à terme, un vaste programme de sauvegarde et de valorisation étendu aux autres collections congolaises. La MAC a pour objectif de rendre accessible cette mémoire à tous les publics ».

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    Un partenariat avec l'Ina pour assurer l'accessibilité des archives

    Pour assurer l’accessibilité des collections, conditionnée à leur traitement technique, documentaire et juridique, la MAC a fait appel aux experts de l’Ina en juin 2021.

    Le site de conservation, construit dans les années 60, se compose de plusieurs corps de bâtiment sans isolation, sans fenêtres et avec un toit devenu non étanche : des conditions peu propices à la préservation d’archives bien sûr très sensibles.

    De fait, les supports sont directement soumis aux conditions climatiques, de température et d’humidité régulièrement élevées de Brazzaville. Ces équipements présentent, en outre, un niveau de dangerosité élevé : étagères instables, rouillées, chargées, supports en équilibre, nombreux déchets et obstacles au sol, poussière omniprésente, moisissures… Une importante campagne de sécurisation, de nettoyage et de tri doit être engagée sans délai.

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    L’Ina : un savoir-faire éprouvé à l’international

    L’Ina est fréquemment sollicité pour analyser l’état de collections d’archives, préconiser des actions à mettre en place, accompagner des opérations de sauvegarde de patrimoines audiovisuels et former les professionnels.

    Grâce à son modèle unique au monde, cette entreprise de service public préserve, numérise, documente et diffuse l’une des plus riches bibliothèques audiovisuelles au monde. Il développe également une large offre de contenus et de services, permettant un transfert d’expertises vers ses partenaires. Récemment, il a accompagné l’Algérie, le Zimbabwe ou encore la Tunisie, notamment dans le cadre de projets financés par l’Union européenne ou l’Agence française de développement (AFD).

    À la demande de la MAC, Éric Rault, responsable de mission-conseil et expertise, Éric Dubois, ingénieur technique multimédia, et Christian Gomis, responsable du centre de conservation de l’Ina, ont donc passé cinq jours auprès des équipes locales pour dresser un état des lieux des conditions de conservation et de l’état des archives.

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    Engager une véritable politique de conservation d'archives

    L’analyse des supports film et vidéo a mis en évidence d’importantes dégradations, conséquence inévitable des actuelles conditions de stockage, le contrôle de la température, de l’hygrométrie, de la qualité de l’air et de la lumière étant d’une importance capitale dans la préservation des supports.

    Lors de la réhabilitation du site de stockage et de traitement, ou du déménagement des supports dans un lieu plus adapté, une attention particulière devra être portée sur ces différents paramètres afin d’engager une véritable politique de conservation.

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    Pendant la mission, plus de 2 000 boîtes film ont été analysées. D’importantes dégradations physiques et chimiques ont été observées, en particulier liées au développement du « syndrome du vinaigre », une forme lente de détérioration qui aboutit au flétrissement et à la déformation du film en dégageant une forte odeur de vinaigre. Un manque d’aération, une forte humidité ambiante et des variations de température ont été des facteurs accélérant le processus.

    La dégradation progresse de façon exponentielle et devient dramatique après le passage du point d’autocatalyse. Il devient donc essentiel de retarder ce moment en optimisant les conditions de stockage.

    « Il est primordial de fixer des règles de conservation et un suivi permanent de l’environnement. Pour la majorité des supports, une température à 20° maximum associée à une hygrométrie de 40 % est un compromis sur lequel s’accordent les professionnels », explique Christian Gomis. « Mais il faut prendre en compte l’âge du support, sa sensibilité, sa fragilité. Plus on descendra dans des températures basses, plus on retardera sa dégradation ».

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    Des archives inédites de l’histoire du Congo ?

    Certaines boîtes, film comme vidéo, contiennent des informations de contenu, quelquefois des conducteurs, qui permettront d’alimenter une première base de données nécessaire au suivi des opérations et, à terme après enrichissement, à la recherche et la valorisation des archives.

    « L’état des supports film et vidéo est certes préoccupant et tout ne pourra pas être sauvé et numérisé », regrette, pour sa part, Éric Rault. « Cependant, il convient de moduler ce constat en effectuant une importante opération préalable de recensement des contenus et des droits associés. En effet, de nombreux éléments sont issus d’achat de droits et d’échange de programmes. Ce premier tri permettra d’engager une campagne de numérisation centrée sur le patrimoine audiovisuel propre au Congo ».

    La collection analysée à l’occasion de cette mission, et l’évocation d’autres sites de stockage, permettent d’envisager l’existence d’archives inédites de l’histoire du Congo.

    Un vaste plan d’identification de ces collections, accompagné d’un travail de récolement, sera à mener lors des prochaines étapes. Ce programme d’identification est d’autant plus nécessaire qu’il permettrait d’identifier d’éventuels fonds de films en nitrate de cellulose.

    « Les films 35 mm, dits “film flamme”, fabriqués jusqu’en 1953, sont hautement inflammables. Ils doivent être impérativement identifiés à l’intérieur de ces lieux de stockage », prévient Éric Dubois. « Cette recherche garantirait la sécurité des bâtiments, mais surtout des personnes. Elle pourrait aussi déboucher sur la découverte d’un trésor patrimonial, une pépite perdue, car de nombreux titres du cinéma tournés en nitrate manquent aujourd’hui à l’appel. La meilleure façon de les trouver est de les chercher ! »

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    Sensibilisation des publics et des autorités à la conservation des archives audiovisuelles

    La MAC poursuit aujourd’hui ses missions de sensibilisation des publics et des autorités à la conservation des archives audiovisuelles au travers de manifestations scientifiques et culturelles.

    En s’appuyant sur les conclusions de la mission de l’Ina, la MAC envisage plusieurs scénarios pour faire face aux risques que présentent les conditions actuelles de stockage sur le site de Bakongo.

    La poursuite du chantier, avec le soutien des autorités locales, permettra de remettre en état les archives de la collection de Télé Congo afin de les visionner, d’identifier leur contenu et de les rendre accessibles aux publics et aux professionnels. À terme, d’autres collections en danger pourraient intégrer le périmètre du projet mené par la Maison des Archives Congo en collaboration avec l’Ina.

    Christian Gomis

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