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Au sommaire :
- Dossier : le KM dans le monde d'après
- « Reconstruire le partage des connaissances au profit de l’entreprise est un vrai enjeu » : entretien avec Aurélie Dudézert, experte de la transition digitale, de la gestion des connaissances et des transformations du monde du travail
- Dépasser des obstacles culturels pour le partage des connaissances : les éditeurs de solutions livrent leurs conseils
- Capitaliser les connaissances dans un mode de travail hybride : les points à retenir pour adapter sa stratégie KM
- Le succès d’un programme KM selon Framatome : retour d’expérience sur un projet lancé en 2017
La pandémie a-t-elle engendré de nouvelles méthodes et pratiques de travail qui se sont pérennisées au fil du temps ?
Mes travaux se concentrent plutôt sur les grandes organisations. Avant la crise du Covid-19, il y avait beaucoup de discours sur la transformation digitale des entreprises, mais la réalité était plus nuancée. Elles n’avaient pas toutes introduit de manière massive des outils collaboratifs, ou encore des modalités de travail à distance ou hybride…
Lire aussi : Rencontre avec Marc-Éric Bobillier Chaumon auteur de "Psychologie du travail digitalisé"
Durant la pandémie, une partie du salariat en a bénéficié et les organisations ont constaté que la productivité n’avait pas baissé - elle avait même augmenté dans certains cas.
Le Covid-19 a donc marqué une sorte de saut qualitatif par rapport à ce que nous vivions auparavant. Les entreprises ont ainsi considéré qu’il fallait instaurer de manière durable le travail hybride, d’autant que cela répondait à une attente des salariés.
Nous avons aussi observé une évolution du rôle du manager, car certains d’entre eux avaient du mal à se positionner, ressentant même parfois de la lassitude et de l’impuissance. Certaines entreprises ont en partie répondu au problème en essayant de repenser les choses ou en travaillant sur des accords-cadres de télétravail.
Quelles sont les problématiques qu’entraînent ces transformations ?
Nous sommes dans une période que nous appelons "permacrises". En effet, de nouvelles crises apparaissent constamment : le Covid-19, la guerre en Ukraine, la pénurie de matières premières, l’émergence de l’IA… De plus, la France est un pays où les conditions de travail sont perçues comme étant particulièrement dures. Ce contexte crée un climat d’incertitude sur une population qui se sentait déjà, à tort ou à raison, maltraitée dans sa sphère professionnelle.
Ces reconfigurations impactent les dynamiques organisationnelles, sociales et productives, dont les enjeux ne sont pas encore suffisamment mesurés par les dirigeants. En plus de toute cette complexification, nous avons introduit beaucoup de technologies et de nouveaux processus de gestion de l’information : ceux-ci rendent le travail encore plus abstrait.
La difficulté du collectif est un autre élément qui a émergé très clairement dans la dernière étude que nous avons menée en 2023 : comment faire ensemble ? Comment valoriser le sentiment d’appartenance ?
Aujourd’hui, l’entreprise représente-t-elle vraiment un lieu de travail ? Constitue-t-elle un bon lieu de travail ou faut-il complètement le repenser ? De grandes questions se dessinent sur l’entreprise en tant qu’institution.
Comment la gestion des connaissances s’opère-t-elle dans ce contexte ?
Je me suis rendu compte que plus personne ne m’en parlait ! Et c’est quand même le signe de quelque chose : soit la gestion des connaissances est devenue une évidence (il y a tous les outils nécessaires et la connaissance circule relativement bien), soit les entreprises ne savent pas par quel bout prendre le problème.
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J’ai le sentiment que les technologies collaboratives (la visioconférence, les échanges de documents, d’e-mails, de tchats…) contribuent à une forme de partage des connaissances. En revanche, tout est très siloté.
L’information circule au niveau de groupes qui se définissent de façon plus ou moins informelle. Tout comme la problématique de l’engagement collectif, reconstruire une forme de partage des connaissances au profit de l’entreprise constitue un vrai enjeu. Ce n’est pas un problème marginal qui va se résoudre tout seul.
Il faut prendre la question à bras-le-corps et penser autrement les façons dont nous faisons du lien et travaillons ensemble.