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Le musée Albert Kahn débute la numérisation de son patrimoine

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    un pont rouge dans un jardin japonais contemporain
    Le pont du jardin japonais du musée Albert Kahn (wikimédias commons)
  • Une planète archivée et numérisée.

    Albert Kahn aurait pu profiter de sa fortune et consacrer le reste de sa vie à sa carrière de banquier. Mais cet Alsacien né en 1860 et mort en 1940 était animé par de plus nobles ambitions : promouvoir le dialogue entre les peuples, favoriser la paix entre les nations et partir à la découverte du monde. Si ses deux premiers objectifs n’ont pas été couronnés de succès, Albert Kahn aura réussi à constituer tout au long de sa vie l’une des plus belles collections de photographies du XXème siècle. De 1909 à 1931, le banquier devenu mécène entreprend de financer des campagnes photographiques et cinématographiques dans une cinquantaine de pays, principalement en Asie et en Europe. Il avait en effet saisi que le siècle qui commençait allait ébranler les sociétés traditionnelles au risque de les anéantir et de les voir disparaître.

    À partir de cet instant, il se donna pour mission de fixer sur la pellicule la vie telle qu’elle était vécue ailleurs : costumes, transports, art, rites religieux, habitats, vie quotidienne… Pendant une vingtaine d’années, les célèbres opérateurs Albert Kahn parcoururent le monde et composèrent une collection qui prend maintenant des allures d’archives de la planète.

    Un fonds unique

    De cette fabuleuse aventure humaine et documentaire, il reste un patrimoine conservé au musée Albert Kahn installé dans l’ancienne propriété du banquier à Boulogne-Billancourt : 72 000 plaques autochromes – un volume sans équivalent –, 4 000 plaques stéréoscopiques et une centaine d’heures de film. « Les autochromes originaux ne sont jamais exposés car ils sont très fragiles. Nous les conservons à l’abri de la lumière dans des boîtes chimiquement pures, souligne Flore Hervé, responsable de la numérisation ; et lorsque nous les numérisons, ce n’est pas pour des raisons archivistiques mais comme support pour les exposer. En ce qui concerne l’archivage, la numérisation est encore loin d’égaler la qualité du support original ».

    Contrairement à une idée communément répandue, la numérisation n’est pas l’alpha et l’oméga de la conservation patrimoniale. Une affirmation particulièrement justifiée pour les collections photographiques et les autochromes du musée Albert Kahn. Ces films photographiques couleur sur plaques en verre brevetés par les frères Lumière en 1903 nécessitent une technique particulière de numérisation. La prise de vue doit être effectuée avec un niveau de lumière extrêmement précis. Le chantier est assuré en interne au rythme de 90 plaques photographiques par jour.

    Bobines de nitrate

    Les collections de film sont, elles aussi, numérisées mais en externe auprès de prestataires spécialisés car le coût du matériel technique et informatique est extrêmement élevé. La chaîne de traitement suit une procédure précise : les bobines de nitrate sont d’abord converties en télécinéma bêta numérique avant de subir une légère restauration. Elles sont ensuite numérisées au format Mpeg 2. Le résultat doit se rapprocher, autant que possible, de l’original. Les collections du musée abritent également près de 2 000 objets – appareils de prise de vue, optique photographique, malles de voyage signées Louis Vuitton… – qui seront photographiés afin d’être exposés en ligne.

    Effort de documentation

    Ce chantier de numérisation ne serait rien sans le système Fakir (Fonds Albert Kahn informatisé pour la recherche) qui permet d’accéder aux collections. Cet outil répond aussi bien aux attentes du grand-public qui visite le musée qu’aux professionnels – documentalistes, chercheurs, éditeurs, photographes – qui viennent puiser dans ce riche patrimoine. Selon Flore Hervé, « les collections doivent s’appuyer sur un important travail documentaire pour savoir où, quand et dans quelles circonstances fut pris tel ou tel cliché. Si, par exemple, la notice indique seulement la localisation " Perse ", elle est considérée comme incomplète... Ce travail de documentation reste un effort de longue haleine ! ».

    Le récolement ne sera achevé qu’en 2014 en même temps, si tout va bien, que la numérisation des fonds. La version professionnelle de Fakir propose des outils de recherche, de sélection, de commande et d’exportation de données. Les équipes du musée Albert Kahn disposent, quant à elles, d’un accès qui permet de consulter les fonds numérisés via des critères de sélection particulièrement variés : informations techniques, époques, nom des photographes, informations juridiques, zones géographiques, etc. La demande peut être formulée en langage naturel.

    Coup fatal

    Ce long travail de numérisation et de documentation aura bien évidemment échappé à Albert Kahn dont la vie s’est terminée moins bien qu’elle n’avait commencé. La crise économique de 1929 porta un coup fatal à sa fortune ainsi qu’à ses activités de mécène. Faute de financement, les missions photographiques et cinématographiques furent abandonnées en 1931 et ses biens furent saisis les uns après les autres. Albert Kahn meurt le 14 novembre 1940 dans sa maison de Boulogne-Billancourt.

     

    Le musée Albert Kahn est aussi un "jardin mappemonde"

    Aux portes de Paris, le musée Albert Kahn est niché au milieu d’un ensemble paysager de 4 hectares composé de multiples essences : jardins français, japonais et anglais, une prairie, un marais, un verger roseraie et même une forêt bleue qui doit sa couleur aux cèdres de l’Atlas et aux épicéas du Colorado. Une serre fait également office de jardin d’hiver. Ce « jardin mappemonde » s’inscrit dans l’inébranlable volonté d’Albert Kahn de promouvoir le dialogue entre les peuples. Le jardin français fut dessiné en 1895 par deux prestigieux paysagistes, Henri et Achille Duchêne, et fut restauré à l’identique au XXe siècle. Le jardin japonais, créé en 1908, fut redessiné en 1988 autour de trois principes : la vie (yang), la mort (yin) et l’axe féminin-masculin.

    Lorsqu’il était enfant, Albert Kahn aimait passer ses vacances dans les Vosges. Devenu millionnaire, il fit planter une forêt vosgienne sur une superficie de 3000 m2. Après la tempête de 1999 qui occasionna d’importants dégâts, elle fut reconstituée avec des hêtres, des pins, des chênes et des épicéas.

    Musée Albert Kahn

    10-14 rue du Port 92100 Boulogne-Billancourt

    http://albert-kahn.hauts-de-seine.fr/​

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