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Sommaire du dossier :
- Archives : comment le patrimoine se numérise
- Les archives de la Société des Nations : un patrimoine bientôt en ligne
- Comment le journal l'Équipe a numérisé 5 millions d'archives photos en 15 mois
- Numérisation mutualisée des actes d'état civil pour le département de l'Oise
Le projet de numérisation en bref
- Nombre de documents : 5,2 millions
- Types de documents : diapositives et négatifs couleur
- Durée du projet : de janvier 2018 à mars 2019
- Budget : 0,20 euro par photo
- Nombre de personnes dédiées : 14 opératrices et 1 ingénieur
« Qu’est-ce qu’on en fait ? On le vend ? » En entendant ces questions, qui concernent une partie du fonds d’archives photo de 15 millions d’images du journal l’Équipe, le sang de François Gille, rédacteur en chef du service photo, ne fait qu’un tour.
Certes, il y a urgence : nous sommes alors au début de l’année 2017 et les salariés du journal (qui appartient au groupe Amaury) viennent d’apprendre qu’ils déménageront l’année suivante dans de nouveaux locaux à Boulogne-Billancourt, à 2 kilomètres de là.
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"Vendre le fonds d'archives ? Jamais !"
Un problème de taille se pose pour une partie du fonds photographique du journal (2,5 millions de diapositives couleur et 2,5 millions de négatifs couleurs datant de 1986 à 2004) conservé jusque-là dans 6 meubles Kardex imposants : les nouveaux locaux n’auront pas la place de les accueillir. François Gille pose son veto : « Vendre le fonds d'archives ? Jamais ! ».
Il faut dire que ce fonds est déjà référencé (chaque boîte contient un reportage déjà indexé avec bordereau). Et le service photo sait prendre soin de ses collections :
« De 1996 à 2016, nous avons numérisé environ 500 000 images, au gré des demandes, notamment du service édition », explique François Gille ; « nous avions également un partenariat avec La Parisienne de Photographie et l’agence Roger-Viollet pour numériser des fonds qui appartiennent au groupe Amaury. Nous avons récupéré ensuite les images qui concernaient le sport ».
Pour convaincre sa direction de se lancer dans un projet de numérisation, François Gille sollicite les conseils du service expert de l’Ina qui conclut au bout de quelques minutes : « Nous n’avons pas grand-chose à vous apporter. Vous êtes prêts ».
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Numérisation sur mesure
L’accord de la direction obtenu, reste à choisir le prestataire qui mettra en œuvre le projet.
« Nous en avons comparé plusieurs », se rappelle François Gille ; « mais nous avions déjà travaillé avec Tribvn et avions apprécié leur contact. Surtout, nous savions qu’ils pouvaient faire du sur-mesure ».
Car les besoins sont précis : en plus de la numérisation, qui doit être rapide (17 000 images par jour) et synchronisée avec l’envoi échelonné des boîtes, un accès prioritaire aux fichiers devra être permis 24 heures sur 24 en fonction de l’actualité, malgré la sortie des originaux. Enfin, un stockage externalisé devra accueillir, à terme, les millions d’images conservées initialement dans les Kardex.
« Tribvn a monté pour nous des chaînes de numérisation en province », poursuit François Gille ; « ils se sont également associés avec un prestataire en Touraine qui conserve les archives dans des conditions optimales ».
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Efficacité et traçabilité de la numérisation grâce à des puces RFID
14 femmes sont recrutées via une association de réinsertion et chapeautées par un ingénieur. Par souci d’efficacité et de traçabilité, on crée pour elles des passe-vues spéciaux ainsi qu’un système de bracelet nominatif doté d’une puce RFID avec détecteur pour déclencher sans contact la numérisation.
Un logiciel de gestion permettant de suivre l’ensemble du processus, depuis le transport des originaux jusqu’à la livraison des fichiers, est également mis au point.
« Chaque semaine, nous remplissions des planches contact que nous rangions dans des boîtes identifiées par un code-barres et les envoyions par courtier, en suivant nos plans de classement », se souvient François Gille ; « nous les récupérions ensuite via un serveur FTP ».
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"On redécouvre des photos !"
En juin 2019, l’ensemble des images de la base est récupéré.
« On redécouvre des photos ! », s’enthousiasme François Gille, qui peut ainsi renouveler ses propositions pour la rubrique « collection privée » du journal, pour les réseaux sociaux, pour des portfolios ou pour l’agence qui commercialise les photos de l’Équipe ; « on fouille beaucoup plus facilement dans notre fonds qu’avant et on retrouve même les originaux plus rapidement ».
François Gille aimerait bien surfer sur la réussite de ce projet pour en lancer un nouveau : la numérisation de 3 millions d’images noir et blanc de 1946 à 1978. Mais il devra se montrer patient en attendant qu’un budget soit disponible.