Aude Inaudi et Jean-Stéphane Carnel sont maîtres de conférence en sciences de l’information et de la communication, respectivement à l’université Grenoble Alpes et à l’IUT2 de celle-ci. Tous les deux membres du laboratoire Gresec (Groupe de recherche sur les enjeux de la communication), ils ont enquêté sur le positionnement et les prérogatives des documentalistes sur le marché du travail dans l'article « Les métiers de l’information, quels profils recherchés ? Le cas des documentalistes » publié en 2017. Carine Zima, documentaliste multimédia pour un service de communication livre sa vision de l'avenir du métier de documentaliste.
Sommaire du dossier :
- Documentalistes, veilleurs, bibliothécaires et archivistes : comment vous voyez votre avenir
- Quel avenir pour les documentalistes ?
- Quel avenir pour les veilleurs ?
- Quel avenir pour les bibliothécaires ?
- Quel avenir pour les bibliothécaires en bibliothèque universitaire ?
- Quel avenir pour les archivistes ?
Quels sont les enjeux actuels du métier de documentaliste ?
Jean-Stéphane Carnel : D’abord, si nous avons observé que le profil de documentaliste est toujours fortement recherché par les entreprises, nous avons également constaté que beaucoup de recruteurs potentiels avaient du mal à définir ce métier, qui devient aujourd’hui un terme générique englobant un grand nombre de compétences.
Aude Inaudi : En plus de ces compétences multiples, nous avons remarqué qu’un grand nombre d’offres d’emploi faisait appel à des doubles, voire des triples spécialisations ou expertises. Enfin, nous nous sommes aperçus que des appellations métier différentes faisaient appel à des compétences de base du métier de documentaliste, autrement dit, la gestion du document. Cette grande diversité dans les appellations ne simplifie pas leur recherche d’emploi.
Faut-il s’en inquiéter ?
JSC : Je ne pense pas. C’est une simple question d’étiquetage. Trois grands pôles disciplinaires sont en jeu par rapport à ce métier : l’informatique, les sciences de l’information et la documentation traditionnelle et, enfin, la communication. En cherchant à savoir si c’était l’informatique et la communication qui venaient chasser sur le terrain de la documentation, nous avons constaté que c’était plutôt l’inverse, pour des questions de positionnement et de visibilité.
L’avenir du métier de documentaliste est-il dans les data ?
AI : Les documentalistes sont formés à l’informatique documentaire, mais pas à un traitement des data suffisamment élaboré pour prétendre au profil de data scientist ou de gestionnaire de données en entreprise — là encore, il existe une grande diversité des appellations. Ces profils exigent des compétences très poussées dans les traitements informatiques. Selon moi, les documentalistes ne peuvent répondre aujourd’hui à ce type d’offres, à moins d’avoir une spécialisation en informatique, bien sûr...
Alors quelles sont les tendances actuelles et à venir pour le métier de documentaliste ?
JSC : Sans être devins, nous observons qu’un profil du documentaliste « idéal » se dessine : bilingue, il a des compétences pointues en informatique tout en maîtrisant les techniques documentaires de base. Par ailleurs, il est capable d’animer un réseau (type community management ou autre) et dispose d’une spécialisation dans le cœur de métier de son entreprise. Un tel profil n’aura jamais de mal à trouver du travail.
Les formations doivent-elles s’ajuster ?
AI : En effet, les documentalistes ont un grand besoin de monter en compétences, et ce dans un certain nombre de domaines, comme l’informatique. Nous observons d’ailleurs une attente dans ce sens à la fois de la part de nos étudiants et des entreprises qui les prennent en stage. La question de l’accès des professionnels déjà en poste à des formations continues est également cruciale, pour les mêmes raisons.
Témoignage
Carine Zima, documentaliste multimédia pour un service de communication
Ce métier peut être exercé partout où l’image est importante, en communication interne, externe… Il valorise le patrimoine iconographique et l’image est de plus en plus importante dans notre société. Le documentaliste audiovisuel qui a le sens de l’adaptation et qui continue à se former sur les aspects techniques a toutes les chances de pouvoir évoluer.
Beaucoup de compétences se croisent, en droit, en documentation, mais il faut aussi faire preuve d’aptitudes en nouvelles technologies.
Ce métier peu connu se prépare à un bel avenir, à condition qu’il soit davantage mis en lumière.