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Travailler dans les métavers, c’est pour demain ?

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    « 80 cas d’usage dans le métavers sont expérimentés actuellement », assure Emmanuel Moyrand, président du cabinet de conseil Azteq et cofondateur de l’association France Meta. (Lifestylememory/Freepik)
  • Les métavers passeront-ils du statut de « sujet tendance » à celui de réalité dans nos organisations ? Loin des fantasmes et des visions marketing, les premiers usages professionnels de ces univers immersifs en 3D se dessinent. Timidement.

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    Où serez-vous en 2026 ? Vous n’en savez rien ? Le cabinet Gartner, lui, a sa petite idée sur la question : il prédit que vous (ou en tout cas une personne sur quatre) passerez au moins une heure par jour dans le métavers. Une projection surprenante, quand si peu de gens sont capables aujourd’hui d’en donner une définition précise. N’y voyez rien de condescendant, vous êtes loin d’être les seuls.

    Le ou les métavers ?

    Même la mission exploratoire sur le sujet, lancée en février 2022 par le gouvernement, et qui a rendu un rapport public de 115 pages le 24 octobre dernier, prouve la difficulté à le définir. À LES définir (soyons précis). Car un tiers de ce rapport tente justement d’en baliser le périmètre, avec un constat : il n’existe pas qu’un seul métavers.

    Lire aussi : Philippe Cassoulat : "Le métavers est une vraie vague qui arrive..."

    Avec ou sans casque de réalité virtuelle ou augmentée, s’appuyant ou non sur la blockchain, nécessitant ou pas un avatar… Le rapport avance tout de même cette « tentative de définition » : « Un métavers est un service en ligne donnant accès à des simulations d’espaces 3D temps réel, partagées et persistantes, dans lesquelles on peut vivre ensemble des expériences immersives ».

    Buzz ou révolution ?

    Trois jours après cette publication, eFutura organisait à Paris sa septième Journée de la transition numérique, avec pour thème : « Métavers et transition numérique : mythes et réalités ». L’occasion pour l’association dédiée à la promotion des métiers de la dématérialisation des documents et du numérique de faire le point sur les technologies, les usages, ainsi que sur les enjeux des métavers et de (tenter de) répondre à cette question : « vraie révolution ou buzz » ?

    Soyons honnêtes, les tables rondes de cette journée ne nous permettent pas de trancher. Et ce n’était finalement pas l’objectif des échanges, qui se voulaient avant tout exploratoires des visions et des convictions d’experts.

    Là encore, différentes définitions ont été avancées et les termes « réalité virtuelle », « NFT » (non-fungible token ou jeton non fongible), « blockchain », « crypto-monnaies », « Web3 », « NLP » (natural language processing ou traitement automatique des langues) ont fusé.

    Car si les métavers existent depuis longtemps (rappelons que le mot « métavers » apparaît dès 1992 dans le roman Snow Crash de Neal Stephenson, et qu’un univers virtuel baptisé Deuxième monde a été créé dès 1997 par Canal Plus bien avant Second Life, qui sera lancé en 2003), le sujet est devenu « tendance » ces derniers mois suite au hold-up réalisé par Mark Zuckerberg sur le mot « métavers » (en rebaptisant il y a tout juste un an Facebook en Meta) et parce que de nouvelles générations de métavers, basées sur la blockchain, émergent aujourd’hui.

    Lire aussi : Michel Beaudouin-Lafon : "Avec son métavers, Facebook essaie d’allumer un contre-feu face aux critiques"

    C’est en tout cas ce que pense Stéphane Gallieni, co-fondateur et associé de l’agence digitale Balistik Art. Il avance, d’ailleurs, une explication : « Si l’on imagine plusieurs couches de technologies, une première serait la blockchain, puis au-dessus les NFT, et en haut le métavers, qui est l’univers immersif », explique-t-il. « Le Web3 est la fusion de ces trois approches, liées entre elles ».

    Les usages des métavers

    Certes, cette immersion en temps réel dans un espace en 3D persistant est déjà bien connue du monde des jeux vidéo. Mais en quoi les métavers vont-ils révolutionner notre quotidien professionnel ? Si les NFT et la blockchain sont presque omniprésents dans les échanges de cette journée eFutura, on constate qu’on en est encore au stade de l’expérimentation du côté du métavers.

    Certains usages sont pourtant déjà une réalité : sont évoqués la vente de terrains ou d’appartements dans le métavers (via des NFT serviciels comme titres de propriété), la modélisation de bâtiments en 3D à distance, ou encore le règlement des litiges et l’arbitrage dans le domaine de l’assurance (« 80 cas d’usage dans le métavers sont expérimentés actuellement », assure Emmanuel Moyrand, président du cabinet de conseil Azteq et cofondateur de l’association France Meta. « L’assurance a beau être un secteur très conservateur, il explore ce nouveau canal de travail et ose se lancer dans l’inconnu ».).

    Lire aussi : Quelle place pour la France et sa culture dans le métavers ?

    Le commerce virtuel, qui pourrait combiner les avantages de l’expérience en boutique avec ceux du e-commerce, pour l’industrie du luxe par exemple, n’est encore qu’un concept.

    Métavers collaboratifs

    « Entre les prototypes et les usages, il y a un monde », reconnaît Bertrand Wolff, président d’Antology. Pourtant, son cabinet de conseil, qui accompagne les entreprises dans leurs projets de réalité virtuelle et de métavers, y a déjà acquis 40 000 m². « Nous nous en servons pour travailler, pour nous réunir ou pour recevoir nos clients dans des espaces dédiés », explique-t-il. « Nous pouvons les modifier en fonction d’un objectif en un claquement de doigts. Et comme ils sont persistants, nous pouvons dédier une salle à un sujet pour toujours, y laisser ou pas des contributions, avec des droits d’accès. C’est une sorte de gestion de projet en 3D ».

    Les services RH s’intéressent également aux métavers, qu’ils voient comme de nouveaux espaces d’interaction pour le recrutement ou l’accueil de nouveaux collaborateurs. L’un des plus aboutis est celui d’Accenture : baptisé « énième étage », il est dédié à l’onboarding.

    « 150 000 personnes, qui ont toutes reçu à leur arrivée un ordinateur portable et un casque de réalité virtuelle, y sont passées en un an », s’enthousiasme Bertrand Wolff. Pour Accenture, qui compte 710 000 salariés dans 120 pays, les enjeux financiers du contexte post-Covid de télétravail et de grande démission sont conséquents : le métavers est un moyen de valoriser l’image de l’entreprise et d’ainsi attirer et fidéliser les talents.

    La formation a également toute sa place dans les métavers, que ce soit pour l’apprentissage de gestes techniques ou l’acquisition de « soft skills ». C’est avec les conseils d’Antology et la technologie Teemew de Manzalab que le Groupe SNCF a par exemple réalisé son métavers collaboratif : un campus virtuel centré sur les métiers du numérique, dévoilé en septembre dernier.

    Lire aussi : Jamespot.land : bienvenue dans le métavers d'entreprise

    400 apprenants ont accès en simultané via un simple navigateur à des stands virtuels dédiés à des compétences (cybersécurité, cloud, etc.). Connectés à un LMS (learning management system ou plateforme d’apprentissage en ligne), ces modules peuvent être intégrés dans un parcours de formation certifiant plus global. Pour des besoins spécifiques, des casques de réalité virtuelle pourraient être déployés à l’avenir dans des environnements plus immersifs.

    Des métavers pour la gestion de l’information ?

    Archimag a posé la question : des usages peuvent-ils être envisagés pour la gestion de l’information des organisations ? Selon Laurent Gayard, enseignant-chercheur, c’est l’archivage sur blockchain qui est à explorer. L’auteur de « Comprendre les NFT et les Métavers » vient de travailler sur le projet Rags, qui entend proposer une cartographie numérique mondiale des différentes ressources archivistiques autour d’André Gide.

    « Ce projet, qui emploie pour l’instant des outils numériques classiques, pourrait utiliser à terme la blockchain pour héberger des informations de localisation mais aussi les copies numériques », explique-t-il.

    Laurent Gaillard estime en effet que l’hébergement des documents dématérialisés devient problématique : « la numérisation permet de préserver des copies numériques de documents fragiles. Mais les supports numériques sont eux-mêmes vulnérables, un livre papier ayant une durée de vie potentiellement plus importante qu’un disque dur ». De la blockchain en soutien, donc, mais le métavers n’est pas évoqué.

    On le voit, la vague des métavers est encore loin de déferler sur les organisations, en tout cas hors des grands groupes et d’usages très ciblés. Mais tout est possible, puisque ces mondes virtuels souhaitent s’affranchir des limites de l’imagination et de la création humaine (« metá » signifie « au-delà » en grec ancien). Avec une contrainte néanmoins : l’impact environnemental de ces technologies énergivores et gourmandes en données, qui n’a pas encore été mesuré.

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