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Au sommaire :
- Dossier : Bibliothèques : quels enjeux en 2023 ?
- Bibliothèques municipales : un dynamisme perpétuel
- Bibliothèques départementales : convergence sociale, citoyenne et environnementale
- Bibliothèques universitaires : entre reprofilage des postes, décrochage des moyens et production de données
- Bibliothèques spécialisées : le cas spécifique du Collège de France
Selon le Catalogue collectif de France, notre pays compte 1 051 bibliothèques et centres de documentation spécialisés. Un réseau riche et diversifié qui offre un accès à des ressources documentaires de première main : Bibliothèque Forney (arts décoratifs et métiers d’art), Médiathèque Nadia Boulanger du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Lyon, Centre de documentation sur les métiers du livre, Bibliothèques des mondes asiatiques du Collège de France…
« Le nombre d’établissements spécialisés s’est fortement accru ces dernières années, avec l’intégration de nombreux centres de ressources d’autres institutions culturelles (bibliothèques des centres d’archives, bibliothèques des musées), mais aussi d’institutions privées telles les bibliothèques des sociétés savantes, bibliothèques diocésaines, fondations ou centres de documentation spécialisés », constate le Catalogue collectif de France.
Accès sur place et à distance
À Paris, le Collège de France fait figure d’institution particulièrement bien dotée en bibliothèques spécialisées. On en compte une quinzaine : bibliothèque byzantine, bibliothèque d’études ottomanes, bibliothèques d’études chinoises, coréennes, japonaises, tibétaines, indiennes et centrasiatiques, bibliothèque Claude Lévi-Strauss dédiée à l’anthropologie, etc.
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« La place de ces bibliothèques est centrale au sein du réseau documentaire du Collège de France », explique Anne Chatelier, directrice des réseaux et partenariats documentaires. « Elles assurent la constitution, la conservation et l’accès à la documentation sur place et à distance pour la communauté du Collège de France, même si des achats d’ouvrages peuvent également intervenir au sein de chaque chaire d’enseignement ou équipe de recherche. »
Un constat confirmé par Thomas Römer, administrateur du Collège de France : « nos bibliothèques rassemblent des fonds exceptionnels et constituent un des outils de travail quotidiens des professeurs de sciences humaines et sociales et des équipes de recherche du Collège de France. Offrant une large palette de services en ligne, elles sont également au service des chercheurs invités dans nos laboratoires ou auprès de nos chaires. »
Des collections qui tendent à l’exhaustivité
57 personnes titulaires ou contractuelles font vivre ce réseau auxquelles il convient d’ajouter une dizaine de vacataires étudiants. Du côté du public, pas de surprise : il est international et composé de spécialistes du domaine. Ces lecteurs trouvent dans ces bibliothèques spécialisées des ressources documentaires nécessaires à la poursuite de leurs travaux académiques.
« Ces collections sont destinées à la recherche et tendent à l’exhaustivité dans un grand nombre de langues. Elles se présentent sur tous types de support, depuis la documentation en ligne souvent dite “de niche” aux archives et aux objets, en passant par les tirés à part de revues. Elles utilisent souvent des classifications spécifiques, ne font pas ou très peu de désherbage, ayant vocation à composer des collections patrimoniales. On y pratique le dépouillement des revues aussi bien que la numérisation de corpus destinés à des projets de recherche. »
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Le Collège de France peut se réjouir : ces bibliothèques ont acquis une influence internationale en raison de la rareté des collections conservées, tant en fonds ancien qu’en actualité de la recherche. Une partie du personnel qui y travaille est d’ailleurs sélectionnée pour ses compétences linguistiques ou de spécialité.
L’un des enjeux des bibliothécaires du Collège de France porte sur la maîtrise de langues rares, anciennes ou vivantes. Ces compétences linguistiques sont indispensables pour les missions traditionnelles de catalogage des collections, notamment celles en caractères non latins.
Mais elles sont également utiles pour le travail de veille éditoriale et les échanges avec les chercheurs étrangers. « Vu la variété des collections, des connaissances dans la gestion des archives, fonds anciens, collections muséales, elles sont souvent nécessaires, ainsi qu’en EAD (1), TEI (2), etc. L’utilisation de logiciels variés impose des formations nombreuses et des capacités de veille dans ces domaines », explique-t-on au Collège de France.
Équilibre entre valorisation des collections patrimoniales et des données de la recherche
À l’instar de ce qui se passe dans les bibliothèques universitaires, les établissements spécialisés sont d’ores et déjà confrontés au chantier de l’exploitation des données, selon Anne Chatelier : « nous devons en effet maintenir l’équilibre entre la valorisation des collections patrimoniales imprimées ou manuscrites et celle des données de la recherche. Nous avons également pour mission de sélectionner au mieux les ressources les plus pertinentes pour les chercheurs dans un contexte économique difficile. Sans oublier de proposer une offre de services élargie, sur place comme à distance. »
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Le réseau documentaire du Collège de France est en effet largement présent sur le web à travers une série de services en ligne : la bibliothèque numérique patrimoniale Salamandre, le portail documentaire Omnia (en écho à la devise du Collège de France « Docet omnia » ;), le portail HAL Collège de France, une base de référencement bibliographique des publications du Collège sous Zotero baptisée « ramus », ainsi qu’une photothèque institutionnelle.
L’IA pour le signalement des collections
À l’heure où les bibliothécaires réfléchissent à l’intégration de l’intelligence artificielle (IA) dans leur métier, le Collège de France estime que les bibliothèques spécialisées doivent elles aussi s’en emparer : » l’IA y a sa place au même titre que dans les autres bibliothèques, dans le signalement des collections et la recherche en ligne, ou pour disposer d’outils de traduction puissants. »
Autant de chantiers technologiques qui n’empêchent pas l’institution de soigner ses salles de lecture. « Celles-ci seront bientôt de nouveau très largement accessibles aux étudiants à partir du master et aux chercheurs des disciplines concernées, dans de magnifiques salles de lecture complètement rénovées, au sein de notre Institut des civilisations, qui va ouvrir après plusieurs années de grands travaux au 52, rue du Cardinal Lemoine », se réjouit Thomas Römer. « Nous sommes toutes et tous impatients de cette réouverture prévue à la rentrée 2023 ! »
(1) EAD (Encoded Archival Description) : format basé sur le langage XML qui permet de structurer des descriptions de manuscrits ou de documents d’archives.
(2) TEI (Text Encoding Initiative) : format de codage de documents structurés en langage XML.