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Charles Huot : Cap Digital a l’ambition de rapprocher le monde politique de la filière numérique

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    "La France ne manque certainement pas de matière grise, mais nous avons un problème de financement", estime Charles Huot, président du conseil d'administration de Cap Digital. (Crédit : Cap Digital)
  • Charles Huot est président du conseil d’administration de Cap Digital. Ce pôle de compétitivité créé en 2006 rassemble plus de 1 000 structures adhérentes (grandes entreprises, PME, entreprises de taille intermédiaire, laboratoires, universités, collectivités, fonds d’investissement…) dédiées à l’innovation numérique.

    Temps de lecture : 6 minutes

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    Quinze ans après sa création, quel bilan tirez-vous de l’activité de Cap Digital ?

    Cap Digital faisait en effet partie des 70 pôles de compétitivité lancés en 2005 et s’est développé en même temps que le numérique s’est développé en France. Nous sommes désormais le plus important pôle de compétitivité français et l’un des plus grands clusters technologiques européens avec environ un millier d’adhérents dont 85 start-up, 70 universités et laboratoires de recherche publique et 70 grands comptes. Notre budget est d’environ 6 millions d’euros pour une quarantaine de salariés.

    Notre bilan, c’est 1,7 milliard d’euros de financements publics en faveur de nos entreprises, un chiffre que l’on peut multiplier par deux si l’on ajoute les porteurs de projets. Soit, 870 projets financés sur environ 1 700 projets qui ont été expertisés par nos experts. Le tout premier projet était Infomagic qui a bénéficié d’une subvention de 40 millions d’euros avec plusieurs dizaines de sociétés impliquées dans le domaine du traitement de l’image et l’analyse de texte.

    J’ajoute que Cap Digital est également un état d’esprit : on s’est aperçu que beaucoup d’entités différentes (start-up, grands groupes et laboratoires de recherche) pouvaient travailler ensemble pour inventer et produire des services de grande qualité.

    > Lire aussi : Charles Huot nommé à la tête de Cap Digital

    Dans le cadre du 4e Programme d’investissement d’avenir (PIA 4), le gouvernement a annoncé le lancement de plusieurs dispositifs destinés à accélérer les transitions numériques et écologiques des industries culturelles et créatives. Quels sont les secteurs qui vont en bénéficier ?

    Les secteurs de l’audiovisuel, les musées, le patrimoine, l’édition, la presse, le spectacle vivant, la musique enregistrée vont bénéficier de ce 4e Programme d’investissement d’avenir. Les domaines d’activité couverts sont donc très larges. Différents appels à projets ont déjà été lancés et des appels supplémentaires seront lancés d’ici le printemps 2022.

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    Un appel à projets doté d’une enveloppe de 10 millions d’euros pour la numérisation du patrimoine verra le jour. Les archives et les bibliothèques sont-elles concernées ?

    À partir du moment où il existe un projet de transformation numérique (numérisation documentaire, indexation, text mining, traitement automatique du langage…), les structures qui évoluent dans les domaines des archives et des bibliothèques peuvent être concernées par cet appel à projets.

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    La France est souvent perçue comme un pays doté d’une importante matière grise mais qui peine à produire des champions du numérique. Partagez-vous ce point de vue ?

    La France possède quelques champions numériques qui sont devenus des licornes [des jeunes entreprises valorisées à plus d’un milliard d’euros, NDLR] mais il est vrai que pour innover il faut deux choses : de la matière grise et des financements. La France ne manque certainement pas de matière grise mais nous avons un problème de financement. Si l’on se compare avec les capacités d’investissement chinois et américain, le constat est le suivant : dans ces deux pays, les investissements y sont dix à quinze fois plus élevés qu’en France.

    L’une des missions de Cap Digital est de faciliter la mise en relation des entreprises innovantes avec les investisseurs. Ce soutien financier est vital : l’intelligence ne suffit pas. Beaucoup de start-up américaines sont nées dans un garage mais très souvent ces garages étaient sur un porte-avions ! La France n’a donc pas à rougir de sa matière grise mais le financement pose problème.

    J’ajoute que le financement aide à retenir la matière grise en France. Aujourd’hui, de nombreux chercheurs en intelligence artificielle qui travaillent dans des laboratoires de recherche français travaillent également pour les Gafam ou des sociétés étrangères qui financent une bonne partie de leur salaire.

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    Peut-on parler de pillage de matière grise ?

    Complètement, car cela concerne également les doctorants qui se font recruter au cours de leur première année de thèse. Mais que faire ? Il faut alerter et proposer des projets motivants aux jeunes chercheurs qui attachent de l’importance à l’argent mais aussi à la nature des projets qu’ils mènent. Si nous parvenons à leur proposer des projets motivants et suffisamment rémunérés, nous pourrons les garder en France.

    Cela veut-il dire que les entreprises seront confrontées à un problème de compétences à court terme ?

    C’est déjà le cas ! Notamment dans le domaine de l’intelligence artificielle. Dès 2018, des projections ont annoncé les problèmes de recrutement auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui. Il faut cependant signaler que des initiatives ont vu le jour pour retenir les meilleurs talents.

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    Le Parlement a récemment adopté un texte visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique. Le concept de sobriété numérique est-il une préoccupation de Cap Digital ?

    Oui, nous avons lancé des travaux auprès de nos adhérents sur la question de l’innovation numérique responsable. La sobriété numérique est un enjeu majeur à tous les étages. Cette préoccupation commence avec l’algorithme de départ et va jusqu’aux infrastructures comme les data centers. Elle concerne également la consommation énergétique de ces centres de données et la production d’énergies renouvelables.

    Cette préoccupation environnementale n’est d’ailleurs pas perçue comme un handicap au développement de l’économie numérique. Au contraire, nos adhérents sont parfaitement conscients de leur responsabilité sociale et environnementale. Des groupes de travail ont vu le jour chez Cap Digital pour expertiser la question de la sobriété numérique.

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    Comment la filière numérique a-t-elle traversé la crise sanitaire de Covid-19 ?

    À la demande du gouvernement, nous avons mis en place un baromètre pour mesurer l’impact de la crise sanitaire sur la filière numérique : beaucoup de sociétés ont profité de la crise pour se développer et recruter. Cette crise sanitaire a dévoilé l’importance du numérique dans l’économie mais aussi dans l’activité des territoires. De nombreuses métropoles nous ont rejoints après la crise sanitaire.

    Contrairement à d’autres secteurs, cette crise n’a pas eu d’impact négatif sur l’activité de la filière numérique même si certaines sociétés ont souffert pour lever des fonds.

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    Avant de prendre la tête de Cap Digital, vous avez fondé la société Themis (fouille de textes) puis le cabinet de conseil People in the sun. Qu’avez-vous appris de ces deux aventures entrepreneuriales ?

    J’ai appris que l’on pouvait avoir plusieurs bonnes idées dans la vie ! Lorsque j’ai quitté Themis, je me suis demandé ce que j’allais faire. Avec le cabinet People in the sun, j’ai élargi mon horizon : je m’intéresse davantage à la question générale des données notamment sur leur statut avec le RGPD. Je travaille également sur les problèmes soulevés par l’intelligence artificielle. J’ai également fondé des entreprises pour développer des data centers pour héberger des machines de simulation numérique et d’intelligence artificielle.

    Chez Cap Digital, ces expériences m’aident à mener des projets collaboratifs et à travailler au rapprochement entre le monde politique et la filière numérique.

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    Sur le Web, à côté de la presse classique qui s’y est exportée pour parfois s’y réinventer, de nouveaux sites d’information politique et générale ou spécialisée ne cessent de faire leur apparition et tentent de conquérir des lecteurs. Parfois thématiques, pouvant cibler telle ou telle frange de public, ils font souvent la part belle à la vidéo. Un expert analyse ce mouvement et ses tendances. Les agrégateurs de presse s’interrogent sur le traitement à réserver à ces nouveaux supports. Il en va de même dans les bibliothèques ou centres de documentation, soucieux d’apporter l’information souhaitée par leurs utilisateurs. Côté back-office, les médias sur le Web recourent à des algorithmes spécifiques et travaillent à l’optimisation de leur référencement. Pour les professionnels de l’information, l’éducation aux médias et à l’information est on ne peut plus d’actualité.
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